Alice & June
5.9
Alice & June

Album de Indochine (2005)

Joyeux mélange des douleurs adolescentes

Un album sur l'adolescence. Un album adolescent aussi. une esthétique digne d'un groupe de lycée, avec ces guitares saturées, très rock, très sombres, ces riffs efficaces comme dans "Alice et June", ou "Black page" ou ces powerChords omniprésents, à la limite du punk (le genre adolescent par excellence). Des paroles sincères et touchantes dans lesquelles beaucoup d'adolescents se sont reconnus et qu'aujourd'hui, jeunes adultes, on essaye de ne pas oublier : " je n'ai pas envie là de devenir qu'un adulte imparfait", "est-ce que c'est vrai ça qu'on sera pire que dans nos rèves" ou encore "maman j'ai peur de tout ce que j'ai à l'intérieur/ maman pourquoi j'ai si peur que tout commence et que tout m’écœure ". La peur aussi, d'un futur dans un monde qui se casse la gueule ( "Aujourd'hui je pleure").
Album en deux parties : Alice et June. Deux personnages ou juste deux facettes d'un seul ? Vous avez vu Fight Club ? J'opterais pour cette seconde hypothèse. Alors il y a Alice, adolescente mal dans sa peau, ("blasphème ô mon corps pourquoi je suis née comme ça"), introvertie, malheureuse, qui remplit ses nuits blanches de ses idées noires, des ses pensées morbides, de son envie que tout s’arrête, mais qui ne passe pas à l'acte, qui choisit la vie ("marcher de travers le ciel pourra m'attendre"), qui espère encore ("j'espère un jour trouver quelqu'un pour m'accompagner"). Mais la tentation de la mort, la fascination est là, et Alice s'assombrit au fil des chansons : "Pink Water" vision romantique du suicide, "adora" : sexe drogue et rock'n'roll, "Un Homme Dans La Bouche", dernier sursaut, rêve d'une vie meilleure, besoin de se sentir moins seule, de trouver quelqu'un qui lui ressemble (voir aussi "Gang Bang" et "Black Page") et le tournant trash et morbide de vibrator et cérémonia.
Alors June prend le dessus, à la façon d'un Tyler Durden, une amie imaginaire qui ose tout ce qu'on ose pas soit même. C'est le côté sombre trash, autodestructeur. Elle semble pouvoir la sauver (cf "Alice et June").Mais bientôt elle perd pied, anorexie, drogue, autodestruction ("June" et "Sweet Dreams").June c'est aussi l'espoir d'un ailleurs meilleur, dans l'autre vie. Et on arrive à "crash me", inspirée d'un fait divers, deux adolescentes qui ont sauté d'une falaise. On peut considérer "Crash Me" comme la fin de l'histoire et en même temps l'emploi du futur et du conditionnel, le verbe "s'imaginer", tout cela laisse une lueur d'espoir, ce n'est peut-être qu'un fantasme, un rève, on peut imaginer qu'à ce moment là June s'en va et Alice se réveille, dans le jour gris de "Aujourd'hui je pleure".
La fin du disque revient à un mal être plus général, ce monde qui tourne à l'envers ("Aujourd'hui je pleure", "Starlight") l'évasion par la drogue encore dans "morphine" et puis quand même cette jolie berceuse, "Tallula" parce qu'il faut pas déconner, ce qui fait la force de cet album, c'est que bien que très sombre, l'espoir y présent, dans presque toute les chansons, la révolte aussi. Ainsi la chute que cet album raconte est une chute potentielle, une histoire cathartique. Mais la vie est là aussi.
Bref, joyeux mélange des douleurs adolescentes que la complexité et la poésie de l'album reflète bien.

Créée

le 14 févr. 2015

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Paul-Bismuth

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