J'ai démarré ce mois de septembre 2016 en sachant que l'album de notre cher Danny Brown serait disponible en fin de mois. L'attente fut éprouvante, rude et longue, mais nous y sommes : Atrocity Exhibition, quatrième album studio du « rappeur » de Detroit est enfin disponible !


Alors, pourquoi indiquer "rappeur" entre guillemets ? Tout simplement car Danny Brown nous a déjà montré qu'il faisait passer son excentricité naturelle dans ses musiques. Peut-on nommer son genre musical par un adjectif existant dans notre belle langue de Molière ? Pas vraiment à ce jour. Et ce n'est pas cet Atrocity Exhibition qui nous facilitera la tâche. Bien que les très bons Pneumonia et Really Doe (featuring Kendrick, Ab Soul et Earl Sweatshirt), deux sons promotionnels, semblaient indiquer une forte présence de « rap pur » dans l'album, l'infernal When it Rains et son clip perché brouillait les pistes à propos du contenu de l'album.


L'album démarre avec un Downward Spiral qui trouverait parfaitement sa place dans l'album XXX, avec une instrumentale sombre qui se mêle parfaitement avec l'objet des lyrics contenu dans cette track (effets causés par la drogue, pensées sombres). Le ton est donné, et le ton s'emballe avec un génial Tell Me What I Don't Know où le flow de l'artiste est différent de ce qu'on a l'habitude d'entendre : une voix plus grave, plus posée, mais une qualité de rap toujours aussi bonne. Les paroles reviennent sur sa difficile adolescence dans les rues de Detroit où la vie n'est pas toujours facile.


Rolling Stone est le premier son marquant du projet. Il faut d'ailleurs souligner l'excellent travail de Petite Noir qui nous a conçu une excellente instrumentale et qui pose excellemment bien sur le refrain. Le son reste facilement en tête, et vous le comprenez facilement en lisant le titre : le sujet concerne bien évidemment la vie agitée de Danny Brown tel une rockstar à l'époque. Par ailleurs, une interview très intéressante à propos du travail collaboratif entre les deux artistes est disponible sur internet. On passera rapidement sur le bon Really Doe qui réunit des rappeurs de qualité (cités plus haut dans la critique). Ce son accompagne mes journées depuis plusieurs semaines déjà, et ne déroge pas au style de musique découvert plus tôt dans l'album. Par ailleurs, la piste 5, Lost, reste dans la même idée avec un sample qui fait bien plaisir. Concrètement, on comprend que Danny Brown s'était un peu perdu dans cette spirale infernale de drogues qu'il présentait dans le premier son du projet, mais qu'il entrevoit maintenant les choses d'une meilleure manière sans avoir besoin de cuisiner ni vendre des substances illicites.


Mon étonnement fut total en écoutant les premières secondes de Ain't it Funny où il m'est clairement impossible de décrire l'instrumentale. Elle est totalement barge à l'image de l'artiste, et je ne pense pas que j'aurais pu réussir à m'ambiancer sur ce son si ce n'était pas Danny Brown qui posait dessus. Track qui défile très rapidement, une impressionnante qualité de flow et des lyrics très captivantes qui méritent d'être analysées pour encore plus apprécier le son, mais qui sont nombreuses. Je vous invite donc à vous pencher dessus si ce n'est pas encore fait, le son n'en donne pas l'air mais les idées sont excellentes derrière ce que le « rappeur » nous raconte. Le ton change totalement avec cette piste, on n'est plus du tout dans ce qu'on avait pu entendre jusque là. La piste suivante, Golddust, poursuit avec une intru qui se démarque également par son côté rock. Le son est un peu moins intéressant, les lyrics sont une nouvelle fois centrées sur la consommation abusive de drogues. Pour continuer dans ces productions un peu décalées, nous pouvons de suite aborder Dance In The Water où Danny Brown, dans l'urgence (énormément de répétitions) tente de convaincre une femme d'avoir des rapports sexuels avec lui. Encore une fois on est dans un son complètement fou, que ce soit dans les paroles ou dans la production. Cependant, même si c'est un son entraînant, c'est l'une des pistes les moins intéressantes du projet. When It Rains est désormais bien connue, la production ne laisse pas indifférente dès la première écoute mais très rapidement on se laisse emporter par l'association de ce beat et du flow de l'artiste.


White Line se démarque par l'instru produite par The Alchemist et par le flow terrible de Danny Brown qui pose à la perfection sur cette diabolique production. Une fois n'est pas coutume, on retrouve l'usage de drogue comme sujet central du son, avec notamment des confessions sur la non maîtrise de soi de l'artiste lorsqu'il consomme trop de drogues. Pneumonia ne nous étonne plus, le son étant sorti plus tôt dans l'été. Il ne nous lasse pas non plus et s'écoute toujours aussi facilement. On entend d'ailleurs une légère contribution (par au point d'en faire un feat) de Schoolboy Q dans la réalisation de l'instru. Les deux artistes ont confirmé avoir un grand respect mutuel l'un pour l'autre. From The Ground est une piste très réussie, abordant la réussite d'un Danny Brown parti de rien et qui pourtant vit une vie relativement aisée aujourd'hui. Kelela, artiste que je ne connais pas, réalise un beau refrain sur une mélodie qui me plaît.


Enfin, nous arriverons rapidement à la fin de ce projet avec un Today très cadencé qui, à l'image de From The Ground, parle de la réussite actuelle de l'artiste et insiste sur le fait que le temps s'écoule vite, qu'il ne faut pas penser au lendemain et se concentrer sur le moment présent pour apprécier la vie. Get High n'a pas forcément sa place dans l'album, le son est très mélodieux et fait clairement promotion d'une drogue déjà bien répandue, l'herbe. B-Real apporte sa touche sur le refrain mais ne me convainc pas (ni de consommer, ni d'apprécier le son d'ailleurs). On termine avec un bon Hell For It qui nous montre un Danny Brown rassurant sur sa santé mentale et sa motivation, le tout sur un beat qu'il dompte si facilement que cela peut en devenir vexant pour les autres rappeurs.


C'était donc avec une grande excitation que j'attendais cet album, et après l'avoir écouté, réécouté et analysé, c'est une excitation toujours intacte. Bien que peu étonné par le centrage lyrical axé sur la drogue et le sexe, je suis totalement impressionné par la faculté de Danny Brown a pouvoir poser son flow sur tout type de musique. Toujours aussi fan de son timbre de voix, je suis convaincu à 100% par l'album. Pour moi c'est une totale confirmation des choses entrevues auparavant, et c'est aussi un soulagement de voir que l'artiste conserve les particularités qui l'ont mené au succès, qu'il réussit à entretenir aujourd'hui (je pense notamment à l'album XXX et la découverte d'un artiste décalé).


Un grand bravo à Danny Brown qui ne déçoit pas avec cet album et qui confirme que c'est un artiste unique en son genre. A n'en pas douter, sa fanbase doit être satisfaite avec ce projet.

Comeaulo
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le 3 oct. 2016

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