http://funkyoudear.com/2011/05/03/fleet-foxes-helplessness-blues/

Ne cherchant pas à faire quelque chose de « cool » mais simplement partager une profonde passion, il semble que la musique de Fleet Foxes ne vieillira jamais. Trois ans déjà que le groupe de Seattle a sorti son EP Sun Giant et qu'un titre comme Mykonos tourne en boucle sans laisser traces de lassitudes. Les très perfectionnistes membres de Fleet Foxes, mené par Robin Pecknold puisent leur inspiration dans la folk music américaine de Paul Simon et autre Crosby, Still, Nash and Young. Chez ces derniers on retiendra les harmonies vocales. En effet, sur la grande majorité des titres de Fleet Foxes, Pecknold est soutenu par deux voir trois voix faisant des ces choeurs et harmonies leur marque de fabrique.

Helplessness Blues fait suite à l'album Fleet Foxes sorti en 2008. Entre les deux, Pecknold s'est fait larguer, et si Fleet Foxes n'étais pas des plus gais, on atteint encore un autre niveau ici. La majeure évolution se trouve aussi dans les arrangements. Le piano se faisant très discret est maintenant très présent. On a aussi droit a beaucoup de violons et parfois des cuivres et des flûtes. La voix est parfois plus poussée, plus virulente que sur les précédents opus.

L'album ouvre avec Montezuma et Pecknold commence par nous poser une question: « So now I am older, than my mother and father, when they had their daughter, now what does that say about me? ». Alors que ses parents à son âge avaient déjà un enfant, lui vient de rompre. Le ton est tout de suite donné; déçu, perdu, désillusionné. Tout au long de l'album beaucoup de questions sont posées. L'empereur Montezuma était connu pour être indécis et sans doute perdu lui aussi. « Montezuma to tripoli » fait référence à l'hymne marines. C'est souvent parce qu'ils sont perdus que de jeunes hommes finissent par s'engager dans la Marines. Ce texte est porté par des choeurs doux et rassurants et un arrangement très léger et minimaliste.

S'en suit Bedoin Dress et ses violons. Les choeurs comme sur Battery Kinzie font immanquablement penser à Simon & Garfunkle. Sur Sim Sala Bim, en plus des violons et du piano on retrouve la mandoline qui leur est si chère.

The Plains/Bitter Dancer est le double titre d'une chanson en trois parties. Une seule note presque continue parcourt les deux premières parties du titre donnant un effet planant appuyé par des voix envoutantes.

Le titre Helplessness Blues, est l'un des plus marquants et réussit de l'album. « I was raised up believing I was somehow unique, like a snowflake, distinct among snowflakes, unique in each way you can see. And now, after some thinking, I'd say I'd rather be A functioning cog in some great machinery serving something beyond me ». J'ai grandi pensant être unique, tel un flocon de neige. Mais maintenant, je dirais que je préférerais être un rouage au service d'une grande machine. Un magnifique texte sur le mal-être, cet « helplessness blues ». Un homme déçu et dépassé par la vie. Fatigué d'être perdu, il souhaiterait qu'on lui dicte simplement ce qu'il a à faire. « If I know only one thing, it's that every thing that I see of the world outside is so inconceivable often I barely can speak. Yeah I'm tong-tied and dizzy and I can't keep it to myself. What good it is to sing helplessness blues, why should I wait for anyone else? ». Si il est une chose que je sais, c'est que tout ce que je vois du monde est si inconcevable que j'en reste sans voix. Oui ma langue est liée et j'ai le vertige, mais je ne peut pas le garder pour moi. Que c'est bon de chanter le blues de l'impuissance, pourquoi devrais-je attendre qui que ce soit? Un chant de désespoir qui, même si il n'arrange rien, fait du bien. Le riff est puissant, la voix est poussée et le résultat est bouleversant.


L'album dans son ensemble est extrêmement bien construit. Et le titre instrumental The Cascades vient marquer une pause après Helplessness Blues. Comme si nous devions nous aussi reprendre notre souffle et nous remettre de cette émotion.

Après une balade ternaire (Lorelei) et le touchant Someone You Admire accompagné uniquement d'une guitare, l'album retrouve un nouveau pic d'intensité avec The Shrine/An Argument. Encore un double titre et encore trois parties pour une chanson de plus de huit minutes racontant ses disputes et sa rupture. On entend Robin Pecknold pousser sa voix comme jamais il ne l'a fait. Criant presque: « Sunlight all over me no matter what I do ». La nature, les éléments et les saisons ont toujours été très présents dans les chansons de Fleet Foxes. L'album précédent parlait beaucoup de l'hiver et de la montagne. Ici le soleil revient souvent, mais pas nécessairement comme quelque chose de doux et chaud, mais plutôt aveuglant, (« All of us walk so blind in the sun » chante-il sur The Plains/Bitter Dancer). Le titre se termine sur des cuivres dissonants qui choquent quelque peu au milieu de mélodies si harmonieuses et pures. Ces cuivres raisonnent comme une complainte.

À nouveau, un titre très calme vient suivre cette puissance. Spotted Tail est chanté tel une berceuse. Le texte est un genre de sonnet à refrain ou le même vers est répété au début et a la fin de chaque quatrains. Et il s'agit encore de questions posées face à un monde vain et une vie sans but. Grown Ocean clôture l'album de manière très entrainante avec ses percussions martelantes. Ici aussi une seule et même note parcourt tout le titre.


Helplessness Blues est un album qui porte bien son nom. A la fois bouleversant et rassurant, il est surtout d'une grande beauté. Une fois de plus, le perfectionnisme de la bande de Seattle ne déçoit pas et on peut aisément parier que leurs albums traverseront le temps.
TristanI
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le 3 mars 2012

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TristanI

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