Marquant la troisième collaboration entre Steve McQueen et Michael Fassbender après Hunger (2008) et Shame (2011), « 12 Years a Slave » (troisième long métrage du britannique), a tout d’abord été dévoilé en avant-première au festival de Telluride, festival projetant des films oubliés et des films qui mettent en avant l’Amérique, voire le Monde. C’est au festival du film de Toronto en septembre 2013, que « 12 Years a Slave » se voit attribué le People’s Choice Award, la récompense ultime du festival, le coup de cœur du public. Une distinction qui généralement annonce la couleur pour les prochains Oscars. Le film en question est potentiellement considéré comme l’un des grands favoris de la prochaine cérémonie. Le TIFF (Toronto International Film Festival), un excellent tremplin pour les Oscars.

Le film a la particularité de sortir en France, tout juste un an après une autre œuvre abordant le même sujet : Django Unchained de Quentin Tarantino. Deux univers et deux approches bien différentes cependant. « 12 Years a Slave » jouant davantage la carte du « fait réel historique ». En effet, « 12 Years a Slave » s’inspire de l’histoire vraie de Solomon Northup (Chiwetel Ejiofor). Steve McQueen (II) adapte les mémoires de ce jeune afro-américain, né libre dans une région sous abolition de l’esclavage: En 1841 (plusieurs années avant le début de la guerre de Sécession). Solomon Northup vit paisiblement avec sa famille dans le Nord-Est américain. Un jour, il est engagé par un cirque ambulant pour jouer du violon dans un spectacle de passage à Washington. Le lendemain, à son réveil, il est enchaîné, battu, puis déporté dans le Sud, où il est vendu comme esclave. Obligé de taire sa véritable identité afin de ne pas être exécuté, il travaille fort et démontre de grandes capacités qui étonnent ses maîtres. L’un d’eux, Maître Epps (Michael Fassbender), est toutefois méfiant à son endroit. Voyant parfois l’opportunité d’avertir ses proches de sa situation, il doit cependant manœuvrer avec prudence afin de ne pas être pris. Son calvaire durera 12 ans.

Pour son troisième long-métrage, Steve McQueen (II) fait preuve d’une grande maturité dans sa réalisation, arrivant à atteindre le niveau des plus grands pour ça. Il alterne parfaitement entre plans larges, dynamiques, plans fixes, etc. Certaines séquences très contemplatives, nous font voyager tel un film du poète Terrence Malick. Parfois, c’est les plans séquences qui prennent le dessus, dont l’un, correspond à la véritable apogée du récit. Une séquence qui vous scotchera à votre fauteuil.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu une mise en scène si maîtrisée, offrant classe et beauté dans des images laissant dégager de vibrantes sensations. Un travail en partie renforcé par celui du directeur de la photographie, Sean Bobbitt (The Place Beyond the Pines ou le OldBoy de Spike Lee) et la partition de Hans Zimmer. Cette dernière n’est pas forcément très inspirée, aux vues de ce qu’il a l’habitude de nous proposer. Pour ainsi dire, les plus cinéphiles d’entre vous reconnaîtront des mélodies similaires à d’autres du compositeur. Mais replacée dans le contexte du film, la bande originale se révèle être magique, renforçant les propos du film et appuyant les images d’un récit déjà très puissant. Le thème principal du film, assez récurrent, vous rappellera celui de La Ligne Rouge ou Inception. Dommage de ne pas avoir été davantage inspiré Mr. Zimmer. Mais on vous pardonne car la musique vient bien épouser les images.

C’est également dans sa distribution que ce « 12 Years a Slave" impressionne. Il faut bien avouer que c’est sans doute le casting le plus classe de l’année. Car du premier rôle aux seconds des rôles, c’est une pléiade d’acteurs connue qui défile sous nos yeux. Certains acteurs vont même jusqu’à apparaître seulement dans une ou deux séquences, assez courtes au final. Je pense notamment à Paul Giamatti et Brad Pitt. S’en est presque frustrant, mais c’est un détail tellement minime comparé au reste du film. Car se permettre de telles têtes d’affiche ce n’est pas donné à tout le monde. Mais c’est quand même à Chiwetel Ejiofor qu’on doit tirer notre chapeau. Lui qu’on avait pour habitude de voir plus souvent en retrait dans d’autres productions, se révèle ici être un incroyable acteur. Sa composition est touchante, capable de jouer un immense panel d’émotions de manière si intenses avec beaucoup de justesse, que certaines personnes sensibles pourraient verser une petite larme au moment d’une scène finale tellement forte et représentatif du film. Oui on peut le dire, ça sent au moins une nomination aux Oscars si ce n’est pas plus… Alors, on dit souvent qu’un excellent film, doit aussi beaucoup à son « méchant ». Dans « 12 Years a Slave », c’est Michael Fassbender qui doit tenir ce rôle. Pas vraiment un rôle de « méchant », mais celui d’un maître vraiment détestable, à faire froid dans le dos et sans aucunes limites dans ses actes et paroles. Michael Fassbender nous terrasse, et pourrait être tout logiquement nominé pour l’oscar du second rôle.

« 12 Years a Slave » se dévore, telle la lecture d’un vieux manuscrit écrit un soir de pluie au coin d’un feu. N’oubliant pas que c’est une époque difficile de l’histoire américaine, tous les ingrédients d’un grand et beau film arrivent tout de même à être réunis: du fort récit à ses sublimes images, tout est à pleurer. Bouleversant. Nul doute que ce « 12 Years a Slave » marquera l’année 2014 et sera surtout, un candidat potentiel très sérieux à la course aux oscars 2014.
Sawyer17
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le 6 nov. 2013

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Sawyer17

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