« Alceste à bicyclette » m’a attiré par la seule présence de Fabrice Luchini au casting. Cet acteur a toujours su me combler de bonheur par sa verve et ses envolées. J’ai donc décidé de partir à la découverte de ce film apparu en salle le seize janvier dernier. D’une durée inférieure à deux heures, cet opus est réalisé par Jean-Philippe Le Guay dont j’avais apprécié le sympathique et touchant « Les femmes du 6e étage ». A cela, la présence de Lambert Wilson s’ajoutait et confirmait mon envie d’assister aux pérégrinations de tout ce petit monde.

L’intrigue s’installe rapidement. Gauthier est un acteur qui connait un succès certain depuis qu’il interprète un célèbre médecin dans une série à la télévision. Il décide de profiter de sa forte côte dans le métier pour monter une pièce de théâtre. Son choix se porte sur « Le Misanthrope » de Molière. Son projet est basé, entre autre, sur le fait qu’il partage l’affiche avec son ami Serge. Ce dernier, talentueux interprète, s’est retiré des planches et vit depuis en ermite dans une maison sur l’île de Ré. Il ne reste donc plus qu’à Gauthier de réussir à persuader son acolyte de retrouver les feux de la rampe…

La mise en place des enjeux est rapide et claire. Lambert Wilson incarne parfaitement le gendre idéal qui accompagne les soirées télévisées de la ménagère. De son côté, qui mieux que Luchini peut jouer cet acteur excentrique retiré du monde public. Les personnages sont posés et je regrette qu’ils évoluent finalement peu au cours de l’histoire. Leurs réactions sont rapidement prévisibles. J’ai souri de leurs divergences ou de leurs disputes grandiloquentes mais je n’ai jamais été surpris par leurs points de vue ou leurs initiatives. Ce léger regret n’empêche pas de profiter de leurs moments de répétition. Voir Serge déclamer du Molière, c’est du bonheur en barre. J’ai été happé par le texte, conquis par les attitudes de l’acteur. Ces scènes de récitation sont nombreuses mais ne lassent jamais vraiment. Je pourrais vous dire qu’elles n’apportent pas toutes quelque chose à la narration ou alors qu’elles remplissent un scénario parfois creux. Je n’aurais pas tort mais ces remarques sont compensées par le talent des deux interprètes principaux.

Néanmoins, le prestige justifié de son duo central ne compense pas les faiblesses globales du film. La première touche le scénario. Il s’avère très léger. Il ne se passe pas grand-chose. Rien n’évolue réellement. A certains moments, la narration se transforme en one man show de Fabrice Luchini. Certaines anecdotes nous font découvrir que Gauthier prend goût à sa vie loin de Paris. D’autres sous-entendent que Serge sort de sa « grotte ». Mais tout cela reste superficiel. L’attrait pourrait résider dans la qualité des seconds rôles. Ils sont inexistants. Ils sont parsemés tout au long de l’histoire mais aucun ne trouve sa place ou possède un impact sur l’intrigue. Il s’agit, à mes yeux, du principal défaut du cinéma français. Les personnages secondaires sont mal écrits et bâclés. Afin de relancer le rythme, le scénario voit apparaître une jolie italienne prénommée Francesca. Interprétée par Maya Sansa, elle doit être celle qui fera naître une compétition et une faille entre les deux amis. Là-aussi le résultat est sans grand intérêt. Non pas que l’actrice soit mauvaise mais le rôle n’est pas suffisamment travaillé pour toucher et impliquer le spectateur dans ce triangle amoureux.

Avant de conclure, je me dois de signaler un autre regret à propos de « Alceste à bicyclette ». Tout le film se déroule sur l’île de Ré. On assiste à quelques clichés qui nous le rappellent. Les deux amis font du vélo, ils marchent sur la plage, les murs sont blancs et les fenêtres sont bleues. Mais malgré cela, je ne me suis jamais senti sur l’île. L’atmosphère n’existe pas. Le film passe son temps évoqué le lieu où se déroule l’histoire mais à aucun moment je ne m’y suis senti plongé. Je trouve cela bien triste. Cet aspect est révélateur des manques de cet opus. Il est entièrement axé sur son binôme d’acteurs. Tout le reste est négligé ou bâclé. Cela fait que « Alceste à bicyclette » ressemble davantage à un téléfilm qu’à un joli film comme pouvait l’être « Les femmes du 6e étage ». Dans ce dernier, chaque personnage était attachant. Ici, tout nous est finalement indifférent. Même le joli dénouement n’arrive pas à faire oublier le sentiment que Le Guay aurait obtenir un meilleur résultat en se donnant davantage de mal…
Eric17
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le 9 févr. 2013

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