La première (vraie) adaptation de comic book

Avengers au cinéma, c'est avant tout un vieux fantasme de fan, devenu encore plus grand quand, en 2008, une courte scène à la fin d'Iron Man présageait la transposition sur grand écran des aventures des Plus Grands Héros de la Terre (et ce n'est pas moi qui le dis). Finalement, quatre ans et autant de films plus tard, Marvel Studios a réussi son pari, et après une campagne de teasing sans fin, Iron Man, Captain America, Hulk, Thor et divers side-kicks s'apprêtent à faire leur première apparition au cinéma, en équipe cette fois.

Et comme ils sont malins chez Marvel Studios, on n'aura évidement nul besoin d'avoir visionné les cinq précédents films de la firme pour saisir les tenants et aboutissants de ce long métrage, chacun des personnages principaux (les quatre cités plus haut, de même que Nick Fury, la Veuve Noire et Oeil-de-Faucon, déjà introduits dans les précédents films, tout comme le méchant Loki, et enfin la nouvelle venue Maria Hill) étant introduit de façon assez brève et efficace. Le souci lorsqu'un roster est aussi élargi (je n'ai pas évoqué les encore plus secondaires Phil Coulson, Pepper Potts ou Erik Selvig), c'est que le traitement des personnages puisse être au final assez inégal. C'est hélas bien le cas ici, et étrangement, pas de la façon attendue.

Si Tony Stark/Iron Man, chouchou des fans et du comptable de Marvel Studios, crève comme attendu l'écran (sans trop tirer la couverture vers lui) par la coolitude et la justesse que Robert Downey Jr apporte au personnage, Mark Ruffalo réussit à nous faire oublier Edward Norton (pas une tâche facile vu le CV du bonhomme) dans le rôle de Bruce Banner/Hulk, là où Steve Rogers/Captain America découvrant les us et coutumes de notre monde moderne est campé par un Chris Evans ayant compris la bonne tournure à donner à son personnage. C'est tout pour les héros principaux, Thor pâtissant d'un Chris Hemsworth mono-expressif mais surtout d'un scénario ne le mettant pas vraiment en valeur. Tout le contraire d'une Natasha Romanoff/Veuve Noire surexposée eu égard à son importance dans les comics. Alors certes, pas sûr que Scarlett Johansson eut accepté de se déplacer pour un cameo de 30 secondes, mais de là à faire passer son personnage pour un pilier des Vengeurs, c'est un peu fort de café. Pour Clint Barton/Oeil-de-Faucon, campé par Jeremy Renner, c'est tout le contraire : vous vous rappelez la mono-expressivité de Chris Hemsworth et le scénario qui réussirait presque à rendre son personnage inutile ? Eh bien à côté de Jeremy Renner, il crève l'écran, c'est dire. Mes coups de coeur vont en revanche à Mario Hill et Nick Fury, incarnés respectivement par Cobie Smulders et Samuel L. Jackson. Personnages de l'ombre dans la BD, ils le restent dans le film, mais chacune de leur apparition est travaillée avec soin, et les fans se plairont notamment à admirer le côté manipulateur qui sied tant au borgne le plus célèbre de l'univers Marvel. Loki restera ma plus grande déception. Si Tom Hiddleston, parfait dans Thor, fait le métier, il n'est pas aidé par le scénario qui ne donne pas la profondeur attendue au personnage, sûrement l'un des méchants les plus intéressants de l'univers Marvel (qui, tout comme Magneto, est loin d'être facile à cerner, alors qu'ici ...).

Avec tant de personnages à introduire, l'histoire d'Avengers, ou tout du moins son déroulement, reste au final assez classique. Une menace se profile sur la Terre, Nick Fury monte une équipe à même de la contrer, des tensions naissent dans le groupe, celui-ci connaît une première défaite, reprend ses esprits et casse la gueule des méchants, avec pertes, pleurs et émotions au passage. Un schéma au final assez typique des comics, on sent là bien l'influence de Joss Whedon, connu entre autres pour avoir oeuvré sur la série Astonishing X-Men. Le créateur de Buffy et Firefly démontre ici son talent de dialoguiste, avec une montagne de répliques vouées à devenir cultes et à faire la fortune des vendeurs de t-shirts. Le seul souci, c'est que ces dialogues ont parfois tendance à un peu trop traîner en longueur, alors quand en plus ils concernent des termes scientifiques à coucher dehors, on en baillerait presque, même si Whedon a beau ironiser à leur sujet à une ou deux reprises. Mais dans l'ensemble, c'est au final assez surprenant (et appréciable) de visionner un film super-héroïque accorder autant d'importance aux dialogues, là où d'autres ont trop souvent privilégié l'action à l'intrigue.

Car si les scènes d'action ne manquent pas vraiment, la plupart s'avère au final assez courte, à l'exception de la très longue et très réussie scène finale, qui vaut bien le fait d'avoir attendu quatre ans pour voir les Vengeurs réunis sur grand écran. Là encore, c'est une chose au final assez caractéristique des comics, mais les règles au cinéma sont un peu différentes, et devoir attendre presque 2h pour voir nos héros se lâcher totalement et tous ensemble, c'était peut-être un peu trop. Ce qui m'amène au petit souci de rythme d'Avengers, son rythme assez inégal, sans doute imputable au trop grand intérêt accordé ici à l'histoire. Celle-ci va crescendo à mesure que l'on devient conscient de la puissance de nos personnes, un sentiment au final assez jubilatoire, jusqu'au feu d'artifice final.

Car c'est bien son côté feu d'artifice qui vaudra à Avengers tous ces louanges. Là où d'autres films du genre ont privilégié une approche plus réfléchie, plus mature (Batman Begins/The Dark Knight, Watchmen), Avengers assume totalement son côté film de super-héros. Ici, point de réflexion sur la nature des super-héros et leur place dans ce monde (ou si peu), on veut du divertissement : chaque dialogue entre nos héros réussit à nous inquiéter ou nous faire sourire, chaque scène d'action, peu importe qu'elle soit courte, excite le fan au sein de nous, et Joss Whedon se permet même de prendre la vie d'un des camarades de nos héros pour mieux nous chambouler. Le cocktail visuel qui nous est offert durant ces 140 minutes est tout bonnement jubilatoire. On avait parlé d'Avengers comme d'un film tourné comme une série TV, il n'en est rien, et chaque scène d'action, de par son intensité, peut concurrencer aisément n'importe quel Transformers, et ce malgré une 3D ajoutée au montage. Mention spéciale à Hulk que l'on n'a jamais connu aussi explosif et réaliste. Qu'on soit ou non fan des Vengeurs avant de rentrer dans la salle de cinéma, qu'on ait ou non vu les précédents films, sortir de la salle en ayant été déçu me paraît difficile si l'on y recherchait du divertissement explosif.

Car pourtant, j'aurais pu être déçu. Pas de référence à l'univers Marvel, pas de nouveau personnage (dire que j'attendais l'Homme-Fourmi serait un euphémisme), une scène d'introduction assez ennuyante, un rythme bancal, des dialogues qui prennent trop leur temps, une menace extra-terrestre dont on a du mal à saisir le risque réel, une invasion peu crédible (si le Cube Cosmique est si puissant, pourquoi ne pas plutôt créer des portails vers plusieurs capitales ?) ... et puis j'ai vu la scène placée au milieu du générique de fin. Et j'ai compris pourquoi j'adore tant le Marvel Cinematic Universe, pour tout le rêve qu'il aura su me vendre au cinéma, ce que DC, malgré Christopher Nolan, n'a pas encore réussi à faire. Avengers, au final, n'est ni plus ni moins qu'un comic book transposé au cinéma, sans besoin de s'adapter aux codes du genre. On y retrouve le même humour, la même tension, les mêmes sacrifices, les mêmes scènes épiques que savent nous offrir de nos jours les Brian Michael Bendis et autres Ed Brubaker. Du cinéma grand spectacle, très grand spectacle. Et la scène post-générique n'augure que du bon sur la démesure que Marvel compte encore apporter à ses adaptations cinématographiques. Comme l'a dit un grand homme un jour : vous n'avez encore rien vu.
Ashlor
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le 26 avr. 2012

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