Peu de proverbes ont été aussi destructeurs pour la culture humaine que "C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleurs soupes". Car si les vrais artistes y voient une invitation à l'inter-textualité, à l'imitation débouchant sur une appropriation et donc une re-création, les faux artistes (qui sont toujours plus nombreux) y voient un moyen de se faire de l'argent, sans vraiment se fouler, sur le dos des générations passées.
Les conséquences dévastatrices de ce proverbe se sont rarement autant faites sentir que dans notre bon jeune 21ème siècle (c'est comme le "bon vieux" sauf que vu qu'il entre à peine dans ses 15 ans et sa crise d'adolescence, on ne peut pas dire qu'ils soit vieux). En effet, à notre époque où toutes les anciennes formes d'art se démocratisent toujours plus, pour le meilleur et pour le pire, et où de nouveaux médiums apparaissent, le nombre de faux artistes explose de façon exponentielle. Attention: la dénomination "vrai artiste" et "faux artiste" n'est pas un jugement de valeur, juste une question d'originalité, et n'engage évidemment que moi. Il y a d'excellents "faux artistes": les Rabeats par exemple, qui font revivre le répertoire des Beatles pour un public avide de nostalgie.


Parmi les "faux artistes", je voue une haine toute particulière à la catégorie des sournois. Et parmi eux, il y en a un qui m'insupporte carrément (une chance! il est Français), c'est Thomas Dutronc.
Soyons clairs 5 minutes: contrairement à Daniel Rivière, j'admirais beaucoup Jacques Dutronc, qui est pour moi un des très bons seconds couteaux de la variété française à l'époque où elle valait encore quelque chose. Jacques Dutronc avait du charme, du bagout même, il avait une voix et un accent immédiatement reconnaissables. Soit, il a aussi fait des daubes, mais il avait un certain art de la composition musicale, aux influences diverses et originales. En bref, c'est une musique agréable, efficace, et pas exhibitionniste, tout ce que la variété devrait être.


Thomas Dutronc a dû se dire, à un moment: "Bon, soyons sérieux. Papa a fait une super carrière, il a trouvé son créneau: je n'ai qu'à jouer sur la nostalgie de ceux qui écoutent la radio éponyme dans leurs trajets en voiture, et le tour sera joué!"
Aussitôt dit, aussitôt fait: Thomas embauche son père comme conseiller technique, et est la nouvelle coqueluche des bobos qui ne veulent pas admettre qu'ils ont vieilli.
Problème : pour le véritable amateur de musique, Thomas n'est qu'une pâle copie de son père. Il a les mêmes tics, s'efforce de prendre le même accent et d'avoir une voix aussi proche que possible de celle du paternel. Il apporte un élément de virtuosité technique, c'est indéniable: sa maîtrise de la guitare manouche est excellente. Le fond de sa musique, le jeu de scène, l'enrobage reste cependant le même que celui de son père, ce qui donne une impression de redite, de vide, presque de mauvais goût...


Eh bien Avengers 2, par rapport à Avengers 1, c'est pareil. Certes, la réalisation de Joss Whedon s'est améliorée. Certes, les scènes de batailles sont plus épiques, mieux filmées. Certes, il y a encore plus de personnages, et un méchant encore plus original (car nouveau). Certes, il y a encore plus de blagues (dans le podcast de Comicsblog sur le sujet, un des membres de la rédaction dit que les personnages "se parlent en blagues", ce qui est très vrai). Certes, il y a plein de liens avec le Marvel Cinematic Universe passé, présent et à venir. Certes,enfin, ce n'est pas un mauvais divertissement, pour peu qu'on apprécie les blockbusters (*Hulk*busters?) américains.
N'empêche que les personnages n'ont pas évolué d'un iota par rapport au premier, que l'histoire est exactement la même (en remplaçant le contrôle mental du bâton par le contrôle mental de la Sorcière Rouge) et qu'au sortir de la salle, le spectateur se demande si, au milieu du déluge de caméos, de clins d'oeil, d'effets spéciaux et de blagues typiquement Marvel, Joss Whedon n'aurait pas dû penser, à un moment ou à un autre, à engager un scénariste.

Ruhenheim
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le 24 avr. 2015

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