Émerveillante vulgarisation intemporelle

À l'instar d'un Dumbo ayant titillé l'empathie du spectateur par le biais d'un éléphanteau différent, Bambi aura été plus loin en instillant à des générations de jeunes spectateurs un dégoût de la chasse des plus certains ; s'auréolant en ce sens d'une séquence comptant parmi les plus émouvantes, si ce n'est traumatisantes, de l'Histoire du Septième Art, le cinquième Classique d'animation des studios Disney s'apparente encore aujourd'hui à un choc culturel n'ayant pas son pareil.


Avec du recul, force est de constater que Bambi, en dépit de flagrantes limites de tous poils (j'y reviendrai), s'avère toujours percutant : cela tient en un point essentiellement atmosphérique, le film arborant une bande originale aux multiples tonalités, et venant alimenter des décors étonnamment immersifs ; sa capacité à jongler entre les genres démontre alors d'une sacrée maîtrise doublée d'une inspiration pas en reste, le tout accentuant avec brio un état d'émerveillement en total contraste avec de savoureuses zones de tension.


Ces dernières sont à mon sens le grand point fort du long-métrage, celui-ci parvenant à instaurer un climat proprement crispant par le biais d'envolées musicales à même de frapper en profondeur... celles-ci retrouvant avec aisance le môme comptant ses printemps sur les doigts de sa/ses main(s), et jusqu'ici oublié par delà un enchevêtrement de souvenirs ayant crû inexorablement au fil des années ; il va ainsi sans dire que le point d'orgue de cette ambiance tétanisante, marquée du caractère implacable d'une Faucheuse glaciale, fait preuve d'une portée dramatique empreint d'une justesse de ton impressionnante, de quoi faire mouche inlassablement.


Et comme pour compléter ce tableau formellement louable, Bambi fait montre d'une richesse graphique patente qu'il convient d'explorer : fort d'une palette saisonnière agissant tel le miroir stylisé d'une atmosphère fluctuante (elle s'y arque à la perfection), ce pan visuel contribue grandement à l'immersion du spectateur au sein d'un univers tantôt chaleureux, tantôt oppressant ; outre son association rayonnante à une BO décidément excellente, cette patte graphique oscille sans faux pas entre l'insouciance printanière des premiers pas et l'âpreté hivernale signifiant la fin de l'innocence, un effet notamment accru au moyen du Prince de la forêt.


Ce dernier témoigne d'une magnification latente plutôt efficace, tandis que dans un autre registre l'orage en premier lieu, puis l'incendie en guise de clôture mouvementée, illustrent fort bien la toute-puissance de la Nature ; ce fameux brasier est d'ailleurs la preuve indéniable d'une performance technique dantesque pour l'époque, ce ballet infernal s'avérant aussi étouffant qu'escompté.


D'un point de vue purement formel Bambi tient toutes ses promesses en somme, mais si l'on ne peut que se satisfaire d'un design réaliste comme mignon pour ses protagonistes sur pattes, difficile d'en dire autant pour ce qui est de leur approfondissement ; on touche alors du doigt l'accroc majeur de cette adaptation d'un roman de Felix Salten, à savoir que le film est sacrément creux au bout du compte, et brille donc d'un intérêt quelque peu limité.


Hormis ses fameux pics de tension, son contenu constitue un divertissement des plus simplistes, et dont la trame clairement découpée au gré des saisons, en plus de filer à toute allure, souligne un cheminement tenant presque de la vulgarisation pour son public enfantin (la séquence du batifolage en tire une couche) ; bien que l'on s'attache à Bambi et consort, la galerie animale est au final nullement fouillée, de quoi mettre en exergue une production certainement tiraillée entre le souci de la vraisemblance et l'attrait charmant de ses figures résolument conscientes.


S'il n'est assurément pas le meilleur Disney, Bambi demeure néanmoins et sans équivoque un chef d'œuvre d'animation intemporel, aussi lui pardonne-t-on volontiers ses carences évidentes au titre de son phénoménal pouvoir nostalgique.

NiERONiMO
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le 28 avr. 2016

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NiERONiMO

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takeshi29
8

P..... de chasseurs !!!!!!

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