La Russie a une longue tradition de productrice de films de guerre. Fort d'un passé récent particulièrement sanglant (première guerre mondiale, révolution d'octobre et guerre civile subséquente, la grande de guerre patriotique de 41-45 et les divers "coups de mains" apportés aux pays alliés durant la seconde moitié du 20e siècle), les cinéastes locaux ont souvent une expérience réelle sur le sujet sans commune mesure avec les autres pays du globe. Ce lourd bagage, couplé au spleen typiquement slave et à l'excellence technique des équipes locales, a permis au pays de livrer de nombreuses œuvres particulièrement marquante dans ce registre : L'implacable Requiem pour un Massacre, l'impressionnante série des Osvobozhdenie (1), le déprimant Afgan Breakdown... Brest Fortress vient se rajouter à cette longue et prestigieuse liste.

Le film raconte l'histoire vraie du siège de la forteresse de Brest (en Pologne) au début de l'opération Barbarossa, en 1941 et comment une partie des hommes qui s'y trouvaient lutta pendant plusieurs jours contre un adversaire nettement supérieur en hommes et en équipements.

Sur bien des points, le film d'Alexander Kott est une parfaite synthèse de la tradition cinématographique Russe du genre et de l'influence Hollywoodienne.
Du premier, on retrouve la présence centrale des enfants, l'héroïsme désespéré des personnages et la présence de nombreuses touches quasi poétiques tout au long du métrage. Du second, on doit l'emphase sur l'action, la présence d'un montage plus nerveux et d'une musique "épique".
Le résultat est un cocktail détonant d'action guerrière et de souffrance déchirante qui, sans égaler les plus grands classiques du genre, lui permet d'obtenir sans difficulté le titre de meilleur film de guerre récent.

Comme toujours avec ce type de métrage se pose la question de la réinterprétation de l'histoire dans le contexte contemporain. Si le film esquive certaines questions polémiques (le fait que la présence des troupes dans ladite forteresse soit l'héritage de l'alliance entre IIIe Reich et Etat Soviétique ou les questions d'Idéologie entre les Commissaires du Peuple et les soldats), il le fait de manière plutôt cohérente et justifiable. L'emphase est mise sur les personnages présents au sein de la forteresse, soit des Russes de leur époque, pour qui ces questions n'avaient pas forcément de sens une fois sous le feu des troupes Allemandes. La survie et la nécessité de combattre devenant logiquement leurs seules préoccupations. D'autres changements mineurs (la mort de certains personnages) sont manifestement faits afin d'accroitre la dramaturgie et remplissent leur but sans que cela n'affecte la crédibilité générale de l'entreprise.

A la fois réaliste et prenant, le film d'Alexander Kott fait honneur à la longue tradition Russe du genre et rend un bel hommage à l'héroïsme des hommes qui se sont battus dans les premières heures de l'opération Barbarossa (2).

(1) Reconstituant l'intégralité de la guerre sur le front Occidental Russe et dont seul le dernier des 5 films est sorti en France sous le titre La Bataille de Berlin.

(2) Des hommes dont l'histoire fut d'abord totalement ignorée jusqu'en 1957 puis totalement exagérée afin de créer un mythe Soviétique à destination propagandiste.
Palplathune
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le 29 juil. 2011

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