Ridley Scott est parti d'un petit scénario de série B pour faire un grand film de science-fiction, à savoir Alien. Alors qu'est-ce que ça donne quand il adapte à l'écran un roman de Philip K. Dick, un des écrivains de science-fiction les plus importants ? Ben... ça fait un truc que je trouve beaucoup moins convaincant.


Le gros du scénario repose sur le thème de l'intelligence artificielle et pourtant il n'arrive pas à en tirer toutes les subtilités. Les questionnements sont bien là, mais à chaque fois le film ne fait qu'effleurer la surface du problème alors qu'il devrait y plonger à pieds joints. Par exemple, le personnage de Rachael avait beaucoup de potentiel du fait de son statut ambigu, mais elle ne se pose quasiment jamais de question sur son existence ou son origine. Et quand elle le fait, c'est au détour d'une phrase, histoire d'alimenter une conversation, mais ce n'est pas approfondi. C'est pareil pour la grande question soulevée par le film, celle à laquelle Scott a répondu récemment, vous voyez de quoi je veux parler. La première fois que j'ai vu Blade Runner, je ne m'étais même pas posé la question. Cette fois-ci j'ai fait attention, et je ne vois pas du tout ce qui a poussé les fans à échafauder toutes ces théories. Le sujet est lancé dans une réplique, puis tombe immédiatement dans l'oubli jusqu'à la fin du film. C'est complètement anecdotique.


Cette "obstination" à traiter le sujet de loin est dommageable : les enjeux des réplicants me paraissent bien faibles. Par exemple la scène où Roy fait une certaine rencontre est censée être magistrale et en dire long sur la psychologie du personnage, mais cela passe très vite et le trait de caractère paraît grossier. Les autres rebelles ne sont pas beaucoup développés. Tout ce qui touche aux opposants est bien plat.


Par ailleurs, l'histoire se révèle très linéaire dans son déroulement. Il n'y a pas de surprise, pas de retournement de situation et encore moins de montée en tension.


J'imagine qu'ils ont voulu travailler la folie qui s'empare des réplicants, mais la Harley Quinn qui saute comme un cabri et le mec en slip qui défonce des murs avec sa tête en mode Looney Tunes, je trouve ça très moyen. Et ne venez pas me parler du monologue de fin, il ne marche pas parce que le personnage est mal construit (et le symbolisme de la colombe, au secours !)


Tous ces défauts sont vraiment regrettables, parce que l'univers du film est super intéressant. J'avais envie d'en savoir plus sur ce Los Angeles sombre, qui semble s'être transformé en Chinatown géant. C'est sombre et pluvieux, sale et mal famé, bref ça fourmille de vie. La musique de Vangelis est également mémorable, les sonorités du synthétiseur se mélangeant parfaitement au style rétro-futuriste de la ville. Et puis Ridley ne fait pas n'importe quoi avec sa caméra, c'est bien réalisé et il y a un grand nombre de bonnes idées (les yeux des androïdes, la machine pour faire des agrandissements de photos, les jouets mécaniques...).


Blade Runner est un film que j'avais envie d'aimer, mais je n'y arrive pas. Tous les défauts cités m’ennuient profondément.

MemoryCard64
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le 19 oct. 2015

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