Curieux film qui manque de dynamisme, il présente un intérêt dans ses étonnantes symboliques, portant sur les femmes et la lutte des classes.
Féminisme contre féminité
Charlize Theron interprète une reine qui prend la place d'un homme, sur un trône, féroce et indépendante, elle est prête à tuer une autre femme plus belle qu'elle, et possède un désir de jeunesse éternelle comme beaucoup de femmes qui lisent trop de magazines, actuellement. Elle porte donc tous les travers du féminisme dévoyée de la manière la plus exacerbée : haine des hommes, rejet de la faute de ses soi-disants malheurs sur eux et compétition concernant la beauté physique avec les autres femmes. Elle ne les représente pas, tout comme certains organes de représentations féministes de notre réalité ne se représentent qu'eux-mêmes. Ce n'est pas une première, évidemment, bien d'autres associations ou organisations dans d'autres domaines font de même et font donc du mal à ceux qu'ils disent représenter en les trahissant chaque jour un peu plus. Et c'est encore plus ironique quand on s'aperçoit à quel point les gens ont vu du "féminisme" dans le personnage de Furiosa de Mad Max: Fury Road, sous l'impulsion de celle qui l'incarne, Mme Theron elle même, dans un rôle, à première vue a contrario de celui de le reine cruelle, Ravanna la belle mère de Blanche Neige. Il faut enfin ajouter que le réalisateur, George Miller a dit lui même qu'il n'avait jamais pensé à son personnage de la sorte !
En face d'elle Kristen Stewart représente la féminité qui peut s'épanouir comme la rose du début du film et comme celle-ci qui peut être forte au milieu de l'hiver, c'est à dire au milieu des difficultés qu'elle traverse. Elle chevauche le cheval blanc telle la déesse Rhiannon, cheval blanc qui est aussi le symbole de la puissance traditionnelle lorsqu'elle sort du château pour être conduite à l'orée de la forêt des ténèbres. De là, la virilité, le chasseur, succombe à sa force et à sa douceur en l'aidant à en sortir. Elle y participe aussi d'ailleurs en calmant la brutalité masculine symbolisée par le troll en rage. Ensuite c'est le baiser de son complément masculin, qui l'a faite grandir et qui a lui même grandi grâce à elle, qui la ressuscite. Enfin elle est bénie par la Nature elle même. Elle est donc complètement femme car suivant l'ordre naturel et le restaurant ensuite de sa force nourricière.
Au fond on peut résumer la confrontation entre les deux femmes de la manière suivante : l'enchanteresse contre la sorcière, la force vitale qui se lie avec son pendant et la pulsion de mort qui le détruit. Voici pour la première allégorie de ce film.
Ken Loach, sors de ce corps
L'autre arrière-plan de l'histoire étonnant c'est l'impression que le fait que ce soit le baiser du chasseur, un prolétaire donc, et non du prince charmant, un aristocrate en somme, qui réveille la princesse n'est pas qu'une simple fantaisie à but commercial (même si peut être un peu quand même). En effet on nous dépeint la belle-mère comme une riche castratrice et de plus, au moment de ressusciter, la douce Blanche Neige laisse sa caractère de chef prendre le pas et s'adresse au peuple. Le chasseur lui même lui dira : "Alors, tu ressuscites et tu diriges les masses". Belle preuve d'appréciation des théories de Marx. Il faut ajouter que les nains sont des mineurs qui ont tout perdu à cause de Ravanna alias Mme Thatcher, la méchante reine. Et c'est eux qui permettent, grâce à leur astuce et leur taille, à l'armée de faire triompher la révolte civile léniniste conduite par une femme. Une problématique digne d'un film de Ken Loach.
On aurait d'ailleurs aimé voir Ken Loach véritablement réalisé ce film car c'est surtout sur sa forme qu'il pêche. Les combats manquent de souffle et le montage les ralentit. Il y a également un manque d'entrain et des dialogues qui ne servent qu'à faire avancer l'intrigue. Les images sont belles sans être le relais fort d'une symbolique intéressante. Enfin les acteurs sont tous au minimum de leur talent, quand ils en ont. Pour résumer c'est lisse parce que toutes les séquences se ressemblent et se suivent.
Au final si vous ne regardez que ce film pour le divertissement qu'il est aussi, l'ennui pourra pointer le bout de son nez mais si vous notez les symboliques et les différences et leurs raisons d'être par rapport au conte originale vous pourrez passer un bon moment devant cette bizarrerie qui vient d'avoir une suite.
PS : D'ailleurs je vais voir cette suite demain …