César doit mourir par Hugo Harnois
Une scène de théâtre, des comédiens qui jouent la pièce de Shakespeare, Jules César. Après l'acclamation du public, les artistes se préparent à rentrer chez eux, accompagnés de policiers. Oui car chez eux, c'est la prison, située dans un quartier de haute sécurité à Rome.
Les frères Taviani ont eu la magnifique idée de porter à l'écran un docufiction relatant les répétitions d'une dizaine de détenus, faisant partie de la troupe de théâtre du pénitencier.
Un air d'harmonica, des hommes qui déclinent leur identité en regard caméra. C'est simple mais doté d'une telle force émotionnelle lorsque l'on sait que ces individus jouent leur propre rôle. Les réalisateurs italiens s'amusent d'ailleurs à jouer entre la réalité et la fiction, de manière qu'on ne sache pas si les prévenus jouent ou non la comédie.
Le choix du noir et blanc (très beau avec ces ombres et cette sensation de pureté dans l'image) n'est pas qu'un vulgaire artifice stylistique qui donnerait à ce film un côté pompeux. En plus de délivrer à l'oeuvre un aspect atemporel, il renforce le côté carcéral des décors avec cette architecture très rude et géométrique.
Nous l'avons dit, l'histoire est d'autant plus forte et porteuse de sens quand on sait qu'elle est vraie. Mais paradoxalement, nous ne savons rien du quotidien de ces prisonniers car ces derniers ne font que jouer sans cesse, et nous ne les connaissons que par leurs personnages, avec un décor qui prend forme et où les murs de la prison ne sont plus des limites pour eux.
Ces taulards ne se considéraient pas comme des hommes mais comme des automates qui n'étaient que dans l'attente. Avec l'arrivée de l'art dans leurs vies, ils sont devenus des êtres à part entière qui possèdent désormais une conscience. Ce film nous le révèle brillamment car c'est par leurs rôles qu'ils peuvent s'exprimer.
Je joue, donc je suis.
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