Un film viscéral, prenant, certes limité par son propre pitch, mais qui nous happe véritablement.

Le cinéma d’horreur a toujours fonctionné par cycle. Les zombies, les films de torture porn, les slashers. Depuis quelques temps, outre les films de tortures, les remakes pullulent sur nos écrans. Pour être un minimum surpris, c’est vers le cinéma indépendant qu’il faut se tourner. Eric England n’est pas vraiment un réalisateur connu, il n’a que peu de films au compteur, tous inédits en France (Madison Country, Roadside). Et avec Contracted, il livre un film des plus passionnants, un peu comme si David Cronenberg au lieu de filmer la transformation d’un homme en mouche dans le film du même nom, avait filmé la transformation d’une femme en zombie. Car Contracted est un film d’ambiance, un film malade, un film sur la transformation, le changement du corps humain. Eric England, qui signe également le scénario de son long métrage, commence le tout de manière étrange, avant de nous induire en erreur en nous montrant un schémas que l’on ne connaît que trop bien. Des jeunes, de l’alcool, une soirée, un inconnu qui arrive. Sauf qu’il échange les rôles. Notre héroïne, Samantha, est lesbienne depuis longtemps, elle est en couple, même si celui-ci va mal, et c’est en buvant trop et en ayant un écart avec un homme que le film plonge dans une horreur viscérale.

Comme dans le métrage de Cronenberg, le film se découpe en deux parties. La première nous montre les changements, notamment physiques, chez Samantha. Perte de cheveux, ongles qui tombent, saignements, migraines, troubles de la vue, peau qui semble pourrir. Rien ne nous est épargné, et le jeune metteur en scène filme l’ensemble avec simplicité, renforçant ainsi le côté réaliste de cet événement plutôt surréaliste. Samantha ira consulter son docteur bien évidemment, pensant à une simple MST, bien qu’assez violente et rapide. La vérité est toute autre bien entendu. Le réalisateur choisit de ne rien expliquer. Ainsi, passé son pitch de départ, le film n’ira pas plus loin. Les personnages sont là, la transformation commence, et puis c’est tout. Pas de véritables explications sur l’origine du virus ou autre, pas de retournements de situations, pas d’arrivée de l’armée. Non, Contracted est un film viscéral, limite clinique dans le traitement de son sujet. Ce choix ne plaira sûrement pas à ceux recherchant un film d’horreur rythmé et gore, car Contracted opte pour un rythme lent, mais le pari est réussi. Si la première partie s’axe sur la transformation physique de Samantha, la seconde elle, qui devient un peu plus violente, s’axe sur les changements qui s’opèrent au niveau de son caractère, de sa façon d’être et de réagir face aux éléments qui lui tombent dessus.

Sa transformation atteint donc son mental et le métrage se fait plus violent, plus sanglant, et donc moins réaliste et paradoxalement, moins viscéral, sans pour autant que ce changement pose un soucis dans la narration même du film ou lors de sa vision. Le changement de ton s’opère parfaitement bien sans qu’une partie de l’histoire ne fasse tâche à côté de l’autre. L’horreur viscérale laisse place à une horreur plus classique dans un sens, mais on peut discerner dans tout cela un sous texte sur la différence et la peur de la différence justement, qui fonctionne bien. Najarra Townsend est parfaite dans le rôle de Samantha, rendant son personnage crédible d’un bout à l’autre, et surtout extrêmement attachant. Elle y est sans doute pour quelque chose dans la réussite du métrage. L’ensemble fonctionne à merveille jusque sa scène finale arrivant finalement un peu trop rapidement. Pour peu que l’on souhaite voir un film d’horreur différent et qui ose aller à fond dans son sujet sans dévier, Contracted est fait pour vous, si l’on adhère à ses choix, et en quelque sorte à la lenteur de son récit. Bonne pioche pour Eric England.
Rick_D__Jacquet
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le 5 juin 2014

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Rick Jacquet

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