Ode en noir et blanc à la montée du (post-)punk rock britannique paraphée par Corbijn, Control dépeint l'émergence du groupe Joy Division sur les scènes à la fin des années 70. Le film prend l'angle de la vie privée de son grave et monocorde chanteur, Ian Curtis.
L'intérêt du film tient dans la relation qu'entretient Ian avec ses amourettes. Ian Curtis, légendaire inexpressif à la sobriété discontinue, incarne la figure de l'activité explosive, se confrontant à un personnage du passif, sa femme Debbie, qui encaisse tant bien que mal les coups de la popularité et de l'indifférence grandissantes de Ian. Debbie prend, à son propre insu, l'air pathétique qu'arborent les absents. Et pour cause : elle ne le suit pas durant les tournées et revêt rapidement les hardes de la cocue de service.
Si l'attitude de Ian enlise la larmoyante Debbie dans son immobilisme, Ian rebrousse sans cesse chemin, trompe mais revient suppliant, animé par la préservation du confort dès qu'il sent qu'il perd pied, puis repart ; s'installe, dès lors, un typique jeu de retours. Il incarne son épilepsie, et c'est en suivant ce fil qu'il perd contrôle de ses prestations, de ses amourettes, de sa vie.
Malgré l'audacieux de la comparaison, il faut bien remarquer que Ian échoue là où Sid Vicious, ce visionnaire méconnu des Sex Pistols qui a inventé la pratique de prédilection des métalleux transpirants aux festivals de Grindcore — le pogo, a admirablement réussi, surtout que tout cela se déroule sur des espaces-temps pratiquement identiques : déjà, Sid meurt plus jeune, ensuite, il parvient à construire un couple qui tient la route avec Nancy Spungen.
Du reste, difficile de reprocher au film de ne pas être esthétique, il se construit sur une sobriété de fond et d'images défilant sur le répertoire de Joy Division qui, après tout, fait bien son travail d'ambiance : une musique à bons textes mais qui ne décolle jamais follement.