On avait un peu perdu Tim Burton dans les limbes des studios Disney avec son Alice aux pays des merveilles enfantin et peu inspiré. Le voilà de retour avec Dark Shadows, adaptation d'un soap-opéra des années 60, où vampires, sorcières et fantômes se côtoient joyeusement. Dans un univers gothique et torturé qu'il affectionne tant, le cinéaste ne se restreint aucunement, livrant un film aux thèmes très «burtonien», fourmillant d'idées visuelles.

1772, Barnabas Collins (Johnny Depp) est le digne héritier de la prestigieuse, riche et puissante famille Collins, fondatrice de la petite ville de Collinsport dans le Maine. Séducteur invétéré, il va commettre la grave erreur de repousser Angélique Bouchard (Eva Green), sorcière de son état. Pour se venger, la belle jette une malédiction sur ses descendants, et le transforme en vampire, puis l'enterre vivant. Deux cent ans plus tard, Barnabas est délivré de sa tombe, et débarque en 1972, dans un monde qu'il ne reconnaît plus.

Avec Dark Shadows, Tim Burton opère un retour aux sources qui lui sied à ravir. Tombant à nouveau dans ses obsessions gothiques, le réalisateur magnifie, comme à son habitude, cet univers sombre qui lui est cher. Du manoir familial, dévoré par la poussière et les ravages du temps, aux falaises où se jettent les vagues et les femmes aux coeurs brisés. Laissant libre court à sa folie, il emplie son film d'effets visuels grandioses (les apparitions fantomatiques, le visage de porcelaine d'Angélique...) , tourne sa première scène de sexe, assez grand-guignolesque, et signe l'une de ses plus belles mise en scène.

Vendu comme une comédie, Dark Shadows semble plus dramatique qu'il n'y paraît. Derrière cette histoire amusante de vampire perdu dans une période qu'il ne comprend pas, se cachent des fêlures propres à chaque personnage. Elizabeth (Michelle Pfeiffer), la matriarche, ne vit que pour la protection de sa famille, le Dr Hoffman (Helena Bonham Carter) est rongée par la peur de vieillir, Barnabas souffre de la malédiction qui le dévore. Angélique, quant à elle, cache sous son apparente exubérance, un vide, une détresse de ne pas être aimée.

Tim Burton distille dans son film les thèmes typiquement «burtonien» tels que l'acceptation de la différence (Edward aux mains d'argent), la part secrète des êtres (Ed Wood) ou encore la famille (Big Fish). Le cinéaste est bien évidemment aidé par un casting de choix. On retrouve avec grand plaisir les habitués : Johnny Depp au look, encore une fois, improbable, Helena Bonham Carter, Christopher Lee ou encore Michelle Pfeiffer, dirigée par le cinéaste 20 ans après Batman, le défi. Mais c'est avant tout Eva Green, petite nouvelle du clan Burton, qui nous étonne. L'actrice se lâche en sorcière transie d'amour, livrant une prestation de haute volée.

On pourra regretter le scénario un peu trop paresseux et les quelques longueurs qui traversent le long métrage, mais Tim Burton parvient, malgré tout, à garder le spectateur en alerte grâce à une mise en scène inspiré, truffée de trouvailles visuelles. Pas le meilleur Burton, mais un bon Burton.
claudie_faucand
7
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le 8 mai 2012

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claudie_faucand

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