La demie belle et la bête

Véritable leçon de vie, le nouveau film du talentueux Jacques Audiard est un véritable coup de poing, d'une puissance émotionnelle rare et qui risque de ne pas laisser indifférent. Délaissant les cours de prison pour les plages de la Méditerranée, il filme la rencontre entre deux êtres que tout oppose, la belle Stéphanie, et Ali, titan au corps apparemment indestructible. Adaptant librement le recueil de nouvelles de Craig Davidson, Audiard révèle une fois de plus tout son talent pour brosser des personnages fragiles et attachants, sous des dehors parfois un peu rugueux.

D'un côté, Stéphanie, interprétée avec justesse par Marion Cotillard, qui voit son existence basculer d'un seul coup suite à un terrible accident d'orque (ça ne s'invente pas). La belle va devoir réapprendre à vivre, ses repères bouleversés par cette tragédie. De l'autre, Ali, à qui Matthias Schoenaerts, la révélation de Bullhead, prête son physique imposant. Celui-ci vit la vie au jour le jour, entre ses piges de gardiens de nuit, ses combats de boxe clandestin et un fils qu'il ne parvient pas à élever.

Sur ce canevas tout simple, Audiard tisse un drame bouleversant, d'une grande puissance émotionnelle. La relation entre ses deux écorchés vifs est d'une simplicité touchante et d'un réalisme confondant. Sans jamais tomber dans le pathos, le réalisateur filme ces deux corps martyrisé au plus près, de façon charnelle et souvent impudique. Jouant avec les ombres et la lumière, il assume sa mise en scène minimaliste, mais d'une efficacité redoutable. Techniquement, c'est parfait, trop parfait diront certains. Malgré tout, on sent une véritable humanité se dégager de la toile, et l'on ressort la gorge serrée dans le monde réel.

Superbe tragédie humaine, De rouille et d'os est probablement le meilleur film d'Audiard à ce jour.