Il dérouille, éros
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le 12 nov. 2012
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La mise en scène est franchement réussie. Il y a de super plans lorgnant tantôt du côté classique, tantôt du côté poétique. Le travail de montage est également bluffant; les combats sont beaux à regarder. Les acteurs sont bons. D'ailleurs je ne comprends pas toute cette haine envers Marion. D'accord elle est pas si bonne actrice que ça. Mais c'est pas non plus une clinche. Surtout par rapport au reproche habituel : elle n'a qu'une expression faciale. Bah les autres acteurs changent pas non plus beaucoup leurs expressions... John Wayne par exemple... Clint Eastwood. Poelvoorde. Dujardin. Melanie Laurent. Naomi Watts. Tous pareils ! A part Jim Carrey qui a un visage en latex, je ne vois personne capable d'avoir plus de 2 ou 3 expressions faciales différentes.
Je signale également que j'avais une grosse appréhension en allant voir le film: un étalage de misérabilisme sans pareil. Et bien non. Curieusement, le réalisateur ne s'attarde pas tant que ça sur le handicap de la jeune fille; tout comme les problèmes d'argent des personnages n'ont pas vraiment l'air d'être des problèmes (à aucun moment cela ne les affecte) Mais cela n'est pas sans conséquence.
En fait, le scénario pose de gros problèmes. Déjà pas d'objectif principal. Du coup tout se fait au fur et à mesure et on ne sait jamais quand le film va terminer. Ensuite, on peut dire qu'au final il ne se passe pas grand chose. Oui il y a tout ce jeu sur le corps qui est intéressant. Mais ce concept (brillant) n'est porté par aucune histoire. Si bien que ça ressemble par moment à du reportage (un docu comporte un message, un reportage consiste à montrer les faits le plus objectivement possible, en théorie). Ici, pas d'enjeux. Et puis, pour en revenir à ce que j'ai dit au paragraphe précédent, si ça aborde la misère, ça ne la montre pas non plus. Ça ne parle vraiment de rien en fait. Même la douleur du personnage féminin n'est pas perçue au contraire. Je trouve que les gens n'ont pas l'air tellement choqué de la voir sans ses jambes... Parfois il y a un ou deux figurants qui sont bouche bée, mais ils ne sont pas vraiment mis en avant. Puis il y a cette scène de drague en boîte. Tellement lourde et évidente. Le réalisateur préfère marquer ce moment de détresse de façon ultra explicite et anticipable plutôt que par des petits détails 'qui font que'.
Ensuite, l'auteur a la facheuse tendance à avorter tout ce qu'il amorce. Durant la première heure, il ne se passe vraiment rien, c'est vraiment du pur reportage. Et puis, de temps à autres émergent des idées de scénario. Il y a par exemple l'espionnage qui aurait pu déboucher sur une intrigue sociale intéressante. Ou encore les combats illégaux. Surtout lorsque l'héroïne en vient à gérer les paris! Quelle situation savoureuse! Qui ne sera pas développée au delà des 2 minutes montrées! Terrible! Le scénario part ainsi dans tous les sens, ouvre des portes que le spectateur ne pourra jamais passer.
Enfin, il y a cette scène de fin des plus ridicule, menant brillamment à un happy ending. Je spoile. Tout au long du film, le père s'en fiche complètement du gosse. Le réal aussi, puisqu'il ne le filme presque pas. Puis, après une ellipse mystérieuse (il fuit ses responsabilités), notre héros retrouve son fils et là c'est comme s'il était super heureux. Déjà un peu absurde, puisqu'on l'a toujours montré mal à l'aise par rapport à son gosse. Passons. arrive donc cette scène sur la glace. Le pire c'est qu'en voyant ça, je m'emmerdais tellement de ce vide dramaturgique, que je me disais que si je devais faire un film du genre je finirais au moins sur un énorme gag : les deux pauvres personnages qui tombent dans l'eau et meurent. Intérieurement, je rigole, et pendant ce temps, à l'écran, le père dit: attends moi, je vais aller pisser. Ce plan de pisse, montrant le papa à l'avant plan dans la neige et le fils à l'arrière plan, m'a fait pouffer de rire! Je me suis dit: ho merde! Ils vont le faire! Et ils le font! Le gosse tombe dans l'eau après avoir bredouillé une phrase du genre 'ha papa je m'amuse trop bien'. Sauf, que c'est censé être sérieux. Et bien sûr, cette scène a de l'intérêt pour émouvoir l'audience, car le drame amène la rédemption et le pardon. Curieusement, personne ne lui en veut d'avoir été si con, Marion revient, les journalistes s'intéressent tous à cette histoire (oubliant que cette publicité devrait lui faire du tort par rapport au procès sur la surveillance illégale des employés) : tout le monde il est heureux... Bref une scène intense pour faire oublier tous les problèmes engendrés par le personnages.
D'ailleurs, cette scène résume bien le film : le peu de conflits présents sont tous évités ou alors réglés en moins de deux minutes. Pour laisser la place au néant. Alors oui, un concept intéressant sur le corps, la destruction (et la reconstruction j'ai pu lire), mais l'auteur n'a vraisemblablement rien à en dire. Au point de s'engouffrer dans des choses un peu débiles comme le personnage de Marion qui se fait tatouer. A nouveau l'idée d'amener le tatouage a un sens par rapport au concept et ça aurait pu être un apport riche, sauf que ce n'est pas développé, ça passe inaperçu au point que certainement bon nombre de gens ont oublié cette scène.
Pour résumer, le film est tel un chandail décousu mais dont le tissu est d'or.
Créée
le 10 juin 2012
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