Jeune homme aux traits angéliques - presque féminins - , Mike semble cloîtré dans une adolescence qui n'en finit pas, pris en étau entre un environnement sexuel étouffant et sa virginité maladive. Deep End narre avec un sens particulièrement aiguisé du mouvement visuel et de la beauté plastique sa plongée dans le monde adulte, se soldant par un ensemble de premières fois. Élève raté, il occupe son temps libre par un premier emploi dans un établissement de bains publics, guidé par Susan, l'employée habituelle, aussi belle qu'inaccessible.

Ce vélo, sur lequel il semble si serein de prime abord, ne serait alors que le reflet de la mécanique bien huilée qu'est la sexualité, laquelle se trouve voilée comme la roue de la bicyclette lors de son accident avec la voiture conduite par Susan. Désarçonné, le voilà livré à lui-même, affaibli, et il ne ressemblera par la suite qu'à une vulgaire marionnette gesticulant autour de Susan.

A travers cette occupation tantôt pénible, tantôt débridée, il se découvre une passion folle pour Susan, quitte à n'exister que pour elle. D'abord timide face à cette idole, son comportement se modifie au fil des jours, et Mike se permet de suivre toutes les pérégrinations de Susan jusqu'à découvrir sa prostitution cachée. Conscient de l'impossibilité de connaître une véritable relation avec elle, il met en place une relation de synthèse, notamment avec une pancarte à effigie de Susan presque nue avec laquelle il se baigne après son premier saut du plongeoir. Cette ''première fois'' en différé permet à Jerzy Skolimowsky de nous offrir une première séquence sous-marine d'onirisme à l'esthétisme pur, où les corps vivants et imprimés se mêlent pour former un tout indissociable. Les formes aplaties de Susan reprennent vie dans ce bain limpide dans lequel elle sombrera quelques jours plus tard. Si Mike ne parvient pas à obtenir Susan vivante, sa seule possibilité est de glisser inconsciemment vers la nécrophilie, en emportant l'objet de son fantasme dans un ballet délicat entre peinture rouge et nappe de sang en suspension. Jamais la mort n'aura été autant sublimée que dans cette œuvre.
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le 22 avr. 2013

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