J'y vais à mon tour de mon petit éloge au sujet de Edward aux mains d'argent, véritable chef d'oeuvre émotionnel et poétique signé Tim Burton. A une époque où le cinéaste n'avait pas encore vendu son âme et se permettait de livrer des petits bijoux cinématographiques voici donc Edward et ses mains-ciseaux, créature échevelée au regard mélancolique et timide. Rendant gloire à l'expressionnisme allemand, au mythe de Frankenstein et à celui de La Belle et la Bête de Cocteau ce quatrième long métrage est une oeuvre très personnelle, certainement le film à travers lequel Burton parle le plus de lui.
D'emblée le générique d'ouverture nous plonge dans une atmosphère féérique et envoûtante, sciemment mis en valeur par la composition sublime et inoubliable de Danny Elfman. Burton laisse une place considérable à la symbolique tout au long de sa fable, permettant aux spectateurs de s'identifier assez facilement au personnage d'Edward. La reconstitution de la banlieue présentée dans le film est une remarquable réussite, Burton montrant avec une certaine acidité des ménagères ingrates et narcissiques. Edward aux mains d'argent parle avant tout de marginalité, de différence, avec une pudeur et un respect proprement bouleversants. Esthétiquement l'oeuvre constitue l'un des principaux sommets de la carrière de Burton, au même rang que Batman Returns et l'étonnant biopic Ed Wood. Magistral.
Construit comme un important flash-back montrant la jeunesse perdue de sa narratrice ( l'angélique Winona Ryder ) Edward aux mains d'argent distille ses émotions grâce à la composition très présente de Danny Elfman et le jeu à la fois expressif et minimaliste de Johnny Depp. On sent l'héritage du cinéma muet dans l'interprétation du jeune acteur, et certains plans sur son visage sont à se pâmer. Le film est simple, touche par sa portée intemporelle et universelle, et promet de bons et beaux sentiments sans en rajouter. Les cinq dernières minutes de ce conte enneigé sont absolument magnifiques. Un incontournable !