Ron no-award

À la manière du Discours d'un Roi, Frost / Nixon est un film qui pêche par son aspect "calibré pour les récompenses" (il ne décrochera cependant aucun Oscar, malgré 5 nominations).
Sujet sérieux et quelque peu délicat (même si le nombre d'années écoulées atténue cela), réalisation parfaitement académique, narration pseudo-documentaire.
Disons-le tout de suite, la forme n'y est que pour peu dans ma note, ce manque d'audace ne joue pas furieusement en sa faveur.
Je concède d'ailleurs surnoter, parce que le film m'a pris par surprise.

Tout repose sur le propos, cet affrontement entre un pitre de la télé et l'impassible Nixon, redoutable orateur et magouilleur.
Les acteurs tiennent la barre bien haute ma foi, et l'ambiance générale, de l'éclairage à la musique, nous placent dans l'intimité de leur brève mais intense rencontre.

Je commençais déjà à pester contre le début, qui élude sauvagement les préparatifs, choix des enquêteurs, travail journalistique.
On découvre rapidement que cela n'est qu'une mise en bouche, l'antichambre qui mène à l'arène, où finalement 75% du film traitera de l'affrontement, sinon en termes de durée, au moins en ce qui concerne l'intensité émotionnelle et dramatique.

De la même façon, la fin est assez anecdotique, et j'aurais sans doute été assez indifférent si le film s'était coupé quelques minutes après la fin de la dernière interview.
Mais à l'inverse, leur présence ne dérange pas, ces quelques scènes permettent de revenir à la vie normale, après le crescendo de cette joute verbale, ce délicieux match de rhétorique et de déstabilisation.

Exploration d'un pan, pour ma part, relativement méconnu de l'histoire américaine sorti du nom Watergate lui-même, Frost / Nixon n'aura décidément pas reçu l'accueil qu'il méritait.
On peut à la rigueur rester quelque peu dubitatif sur la nécessité de susciter de la sympathie pour Nixon, ce qui sert toutefois le dénouement.
Relativement déconcertant, peut-être aussi en raison du condensé rendu obligatoire par le format cinéma, ce qui rend plus artificiel le glissement dans l'attitude du président en disgrâce.
Un écueil difficilement contournable, je le reconnais.

Loin d'être un film mineur dans la filmo de Howard, cela devient pour moi un coup de coeur incontestable.
C'est un service que je vous rends, quand je vous demande humblement de lui offrir sa chance.
Ne laissez pas passer !