Ecrit en 1927, le roman éponyme d’Herbert Asbury narre l'histoire de la grande pomme durant les vingt années qui précèdent la guerre de Sécession.
En s'appropriant ce matériau d'une infinie richesse, Martin Scorsese en fait une impressionnante fresque où se mèlent la grande et la petite histoire.
La beauté incroyable des images crées par le cinéaste, rendent hommage aux thèmes de prédilection qui habitent son oeuvre et dessine une jungle urbaine impitoyable, un paysage social, culturel qui marquera le destin de ca pays à la fois fabuleux et monstrueux.
New-York, la violence, la solitude des hommes, leur corruption sont au coeur de cette intrigue fascinante.
Loin des grands espaces mythiques, le pays prend la vie par la force, au prix du sang de ses fondateurs.
Gangs of New-York n'est pas seulement un film d'histoire. C'est un film de gangster dans la plus pure tradition scorsesienne. Sauf que leur manque la "classe" des personnages de la filmographie antérieure. En y réfléchissant, c'est tout à fait compréhensible si le spectateur tient compte de la dose de western, genre spécialisé dans la construction du mythe fondateur américain, que le petit géant de Little Italy insuffle à son film.
S'il cède aux codes du genre c'est pour mieux se les approprier et en faire une émulsion personnelle dont personne d'autre ne détient la recette. Il fait donc de sa fresque historique un western urbain.
Il ne faut oas oublier que comme dans Le temps de l'innocence, le maître a un sens impressionnant du détail. Des personnages réels, ayant sévi dans le quartier où il a grandi, il dresse un portrait digne d'un historien spécialiste. La précision qu'il apporte aux décors, costumes et autres détails comme les accents, le vocabulaire, les objets d'époque, est une nouvelle preuve, s'il en était besoin que Scorsese n'est pas qu'un simple cinéaste comme les autres. La prestation de Daniel day-Lewis est à ce titre et une nouvelle fois exemplaire. Ce putain d'acteur se glisse dans la peau de Bill (Bill Poole) comme si c'était la sienne. Et c'est là aussi le génie de scorsese, faire travailler des comédiens à la hauteur des ambitions de ses films. En conjuguant le récit d'une vengeance filiale à une histoire d'amour, il n'encombre pas son scénario de rebondissements alambiqués et se concentre sur ses personnages et la naissance de l'américanisme. Les Natifs et les deads rabbits ont réellement mis la ville des années 30 et 40 à feu et à sang.
La violence mise en scène par Martin, sert à montrer l'organisation de l'espace en s'exercant en premier lieu sur les nouveaux venus. L'arrivée en masse d'irlandais est montrée comme une invasion et si la majorité des arrivants sur le nouveau continent ne restent pas sur place, plus de la moitié des new-yorkais sont nés à l'étranger et menacent l'identité protestante de la ville. Même si, à l'époque Boston et Philadelphie comptent bien plus d'actes de violence Big Apple est le lieu ou il faut éliminer ses rivaux pour gagner sa place.
Avec son dernier plan d'anthologie d'une force évocatrice rarement égalée, Scorsese que la violence fait encore partie du quotidien des américains, qu'ils sont construits de cette façon et que si la mort de Bill Poole, véritable Bill le Boucher a mis fin à cette bataille, détruit le quartier de Five Points en l'incendiant, d'autres haines, d'autres rivalités mettent à mal le rêve américain et endeuillent les success stories.
Si la mise en scène est d'une maestria fabuleuse, il n'en est pas de même pour la copie en ma possession. Le son n'est pas mauvais mais l'image n'est pas digne du travail du réalisateur.
Les bonus n'ont rien d'extraordinaire et font pâle figure face à l'ampleur de l'oeuvre.


https://www.youtube.com/watch?v=sj15WP_tUoo

Rawi
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le 8 mai 2016

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