Si vous aimez les films un peu WTF qui vous font mal au cerveau pour votre plus grand bien, ce dernier Carax, Holy Motors est incontournable. Le film est loin d'être parfait, pas mal de tics auteuristes malheureux viennent plomber le film (notamment cette fin déconcertante avec ces singes présents on ne sait trop pourquoi, et un discours en arrière-plan sur le cinéma trop conservateur pour me convaincre) et je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a quelques longueurs, par exemple dans cette séquence avec Kylie Minogue, relecture certes intéressante du fiasco des Amants du Pont-Neuf mais qui s'étire sans réussir à cacher sa fin très prévisible.

Mais la force du film réside avant dans ces fulgurances de style remarquables et cette construction assez subtile dans laquelle on met du temps à rentrer, mais qui au final s'avère plutôt stimulante. La palme, pour ainsi dire, revient à cette scène d'entracte euphorisante au son des accordéons reprenant Let My Baby Ride de RL Burnstein dans une église vide. Carax, s'il plombe malheureusement son film par quelques boursouflures superflues, offre néanmoins quelques images mémorables qui auraient tout à fait justifié une place dans ce palmarès cannois qui l'a boudé, ce que je peux néanmoins comprendre, tant le film peut diviser dans sa radicalité, jusque dans l'expérience d'un seul et même spectateur.

Reste un casting dans l'ensemble irréprochable, mené de main de maître par un Denis Lavant au sommet, transformiste magnifique aux mille visages, comédien des comédiens, qui prend rendez-vous directement pour la prochaine cérémonie des Césars. En Merde comme en homme du peuple, il incarne tous les délires de Carax et nous transporte dans chacune de ses métamorphoses. Il arrive même à combler les quelques faiblesses qui peuvent éclore dans l'écriture de chacun de ses avatars par la seule force de la présence magnétique de son physique atypique.

Au final, bien qu'il ne soit pas le chef-d'oeuvre ultime qu'on peut imaginer à l'écoute de certaines critiques, Holy Motors est un film vivant, prenant, bordélique mais attachant, porté par une performance d'acteur sidérante. Une bonne surprise en somme, étant allé voir le film à reculons.
Sharpshooter
9

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le 6 juil. 2012

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Julien Lada

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