D'Hong Sang-Soo je n'avais vu que The Day He Arrives et La Vierge mise à nu par ses prétendants. J'avais beaucoup apprécié ces films, avec une petite préférence pour The Day He Arrives.
Difficile de décrire les films d'Hong en communiquant son enthousiasme. Ceux que j'ai pu voir, en tous cas, étaient des films à budget très réduit, centrés autour des personnages et des lieux qu'ils hantent.
Souvent dans l'œuvre du réalisateur on retrouve le même personnage, un réalisateur prisonnier de son art, qu'il en soit obsédé ou très imprégné. Un personnage quelque peu errant, qui rencontre des personnalités au hasard de situations. Dans ces 3 films que j'ai vu, il y avait cet élément de découpage dont je ne me lasse pas, qui consiste à mettre en scène des personnages dans les mêmes endroits, au gré de situations différentes, qu'il s'agisse d'une situation parallèle dont les mondes sont très proches, ou présentant de légères différences dans le déroulement des faits.
Dans In Another Country, on assiste à 3 histoires possibles se déroulant en Corée. Isabelle Huppert incarne tour à tour une femme trompée par son mari avec une femme Coréenne, venue en Corée se reposer avec une amie, une riche femme infidèle venue retrouver un réalisateur dont elle est tombée amoureuse, et une amie d'un réalisateur venue passer un peu de temps en Corée.
Autour de ces situations gravitent des personnages et des rencontres: un maître nageur quelque peu loufoque et dragueur, des amis ou proches dévoués, aimants ou agacés... et toujours cette constante dans le cinéma d'Hong Sang-Soo: des beuveries, des déclarations maladroites, des histoires sans lendemain. Une sorte de quotidien un peu fantasmagorique explorant les passions humaines et les relations sociales qui s'imbriquent.
C'était le premier film du réalisateur que je voyais en couleurs, avec une palette très orange : Hong s'expliquait là-dessus en racontant qu'il est difficile de filmer une histoire légère dans un paysage gris. Le rendu à l'écran est très agréable, et je me suis senti tout aussi chez moi dans l'univers du cinéaste que lorsque je regardais ses films dépourvus de couleur. Le film est réellement un film à petit budget : tourné en 15 jours avec le budget d'un court-métrage qu'Hong avait débloqué. Cela ne se ressent pas vraiment : on reste un peu en lévitation dans ce monde très contemplatif, et on assiste au déroulement des scènes en lisant tout ce qu'on trouve dans le regard des acteurs.
Isabelle Huppert est juste dans ses 3 rôles. J'ai vraiment eu le sentiment d'avoir eu affaire à 3 femmes réellement différentes au cours des situations. Selon les scénarii, elle parvient à s'intégrer parfaitement dans le paysage du cinéaste, ou s'en détacher complètement (dans le cas de la bourgeoise, par exemple).
Le film est réellement léger et plutôt marrant. Il y a d'ailleurs un très bon papier sur le rire dans le cinéma d'Hong Sang-Soo dans le numéro d'octobre des Cahiers, que je recommande chaudement (si l'envie vous prend de creuser ça).
C'est un film qui me conforte dans mon intérêt pour le cinéma d'Hong Sang-Soo, apparemment largement inspiré du cinéma de Bresson. Va falloir que je m'y mette à Bresson, quand même.