Alors que personne ne s'y attendait, près de vingt ans après La Dernière Croisade, Georges Lucas (le scénariste-producteur) décide de convaincre Spielberg de rempiler pour un quatrième volet des aventures du plus célèbres des archéologues aventuriers. Avant le film, on avait de sérieux doutes, à voir ses derniers (depuis à peu près A.I.), sur comment le réalisateur américain allait pouvoir revenir au blockbuster fun et sans prises de tête, après sept ans de films plus "adultes".


La réponse nous sera donnée très rapidement, Spielberg n'ayant jamais été connu pour vouloir jouer au plus vicieux avec son public. Avant même le premier plan du film, Spielberg nous affirme donc que ce film sera placé sous le signe de la légèreté et du vicié. Le logo de la Paramount, qui était au début de chaque Indy fondu avec une montagne, est fondu ici avec une... motte de terre d'où sort une marmotte. Et tout est déjà dit : Spielberg ne peut pas revenir à Indiana Jones avec sérieux, quand il est allé jusqu'à La Guerre des Mondes. Il n'y a pas de retour possible.


Alors le pauvre Indiana Jones (the same old Harrisson Ford) se retrouve en pleine Guerre Froide, lui qui n'avait connu que la lutte contre les nazis. Et, comme pour enfoncer le clou, Indy est à la traîne, enfermé dans le coffre d'une voiture du KGB, comme engoncé dans une époque qui n'est plus la sienne. Prisonnier puis poursuivi par les Soviétiques menés de main de maîtresse SM par Cate Blanchett, il se retrouve très rapidement dépassé dans la quête invraisemblable des crânes de cristal, qui le mènera, après moultes aventures, jusqu'à l'Eldorado. Le docteur Jones, qu'on croirait en préretraite, ne fera dans cet épisode qu'arpenter un chemin déjà foulé par un autre scientifique (John Hurt).


En effet, la quête n'est ici qu'un prétexte. C'est pour Spielberg l'occasion de rendre hommage à tout son cinéma pré-2000, l'époque où il était l'emblème du blockbuster joyeux et insouciant, l'époque des précédents Indiana Jones. Le Royaume du Crâne de Cristal n'est pour une grande partie que ça : un jubilé désabusé certes, mais tout à la fois fun et kitsch. En effet, le film n'arrête pas, les péripéties se succèdent comme les cascades pour l'équipée (on passe par une explosion nucléaire, un combat au fleuret en pleine jungle par voitures interposées, l'attaque d'une colonie de fourmis et même, ultime hommage, l'envol final d'une soucoupe extraterrestre). Tout cela fait parfois un peu too much, mais qu'à cela ne tienne, on pense au meilleur produit du "blockbuster fun" récent : Transformers, produit par Spielberg himself et on se dit qu'il s'agit peut-être là d'une remise de flambeau de la part de Steven. Du film de Bay, il récupère également Shia LaBeouf, parfait avatar de James Dean.


Enfin, c'est l'occasion pour Spielberg d'affirmer ce qui l'intéresse plus que tout de nos jours : les retrouvailles et la création d'une relation entre un père et un fils et, comme de plus en plus régulièrement sur nos écrans, le mariage final entre Dr. Jones et Mrs. Ravenwood (Karen Allen, récupérant elle aussi son ancien rôle). Et Spielberg de se faire sage stoïcien, paraphrasant peu ou prou Sénèque, regrettant le temps perdu. Qu'il parle là de sa carrière d'"entertainer" ou de ce film, on peut le rassurer : il l'a rarement été mieux.

ukhbar
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le 18 déc. 2010

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