Il est toujours un peu maladroit de nous vendre un nouveau film comme totalement novateur quand celui-ci s’inscrit dans une veine parodique, ou tout au moins de pastiche. De ce point de vue, Kingsman fait son boulot et ne va, dans son scénario, pratiquement rien révolutionner des codes en vigueur, entre agence d’espionnage et méchant mégalo appliqué à détruire la race humaine.
Après quelques séquences bien enlevées en matière d’action chorégraphiées (Jack Davenport se fendant la poire, la présentation de Colin Firth dans le pub armé de son parapluie), le film s’enlise un temps dans une banale intrigue initiatique, avec épreuves, rivaux et compagnie. L’ennui pointe, même si le traitement du comic garantit une certaine fraicheur, une légèreté de ton qui évite qu’on sombre totalement.
C’est alors que surgit l’idée du film, à savoir l’éradication de l'humanité qui s’entretuerait sous l’influence de leur carte sim. En guise de répétition générale, le bad guy de service (L. Jackson qui zozote avec une casquette inclinée, franchement dispensable pour le coup) teste son produit à l’intérieur d’une église de fanatiques.


Et là, le film prend soudain trois points.


Massacre totalement jubilatoire à la méchanceté parfaitement assumée, cette séquence est un régal. Les dents volent, les cranes se fracassent, on crible indifféremment femmes et vieillards, le tout filmé avec une fluidité confondante, passant d’un pieu à un extincteur, d’un chargeur vide planté dans une gorge à l’usage de tout le mobilier à disposition.


[Spoil]
Vaughn reproduira cet effet dans le final, digne d’un Dr Folamour, feu d’artifice de décapitations nucléaires éradiquant en un seul geste la totalité des nantis de la planète, le tout sur Land of Hope and Glory de Sir Elgar.


Outre la maitrise visuelle du film, les séquences d’action étant de haut vol, c’est surtout dans le ton que le film se distingue. Pop et acide, violent et sans compromis (à ce titre, la mort d’un des protagonistes est pour une fois véritablement efficace et surprenante), il séduit au sens propre du terme : sortant des sentiers battus, il surprend.


Le rire et la jubilation qui accompagnent ces scènes mairesses ne saluent pas que le savoir-faire du film : c’est aussi l’expression d’un soulagement face à la capacité du cinéma de grande consommation à encore pouvoir nous séduire.

Sergent_Pepper
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Comédie, Blockbuster, Violence, Mélange des genres et Parodie

Créée

le 26 févr. 2015

Critique lue 3.7K fois

145 j'aime

18 commentaires

Sergent_Pepper

Écrit par

Critique lue 3.7K fois

145
18

D'autres avis sur Kingsman - Services secrets

Kingsman - Services secrets
TheBadBreaker
8

My tailor is rich

Le nouveau film de Matthew Vaughn n'offrait pas de grandes promesses aux spectateurs. Il y avait même de quoi s'inquiéter. Un sous-titre rappelant des émissions M6, un Samuel L Jackson en jogging sur...

le 19 févr. 2015

149 j'aime

18

Kingsman - Services secrets
Sergent_Pepper
7

Kill jubile.

Il est toujours un peu maladroit de nous vendre un nouveau film comme totalement novateur quand celui-ci s’inscrit dans une veine parodique, ou tout au moins de pastiche. De ce point de vue, Kingsman...

le 26 févr. 2015

145 j'aime

18

Kingsman - Services secrets
Fritz_the_Cat
7

Umbrella Corporation

En soi, pas de quoi s'exciter. Un jeune rebelle qui file droit suite à un entraînement qui le révèle à lui-même, la formule est connue. Et efficace : sentir un nouveau pouvoir germer chez un...

le 19 févr. 2015

111 j'aime

13

Du même critique

Lucy
Sergent_Pepper
1

Les arcanes du blockbuster, chapitre 12.

Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...

le 6 déc. 2014

764 j'aime

103

Once Upon a Time... in Hollywood
Sergent_Pepper
9

To leave and try in L.A.

Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...

le 14 août 2019

698 j'aime

49

Her
Sergent_Pepper
8

Vestiges de l’amour

La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...

le 30 mars 2014

612 j'aime

53