(...) John Carpenter avait de l’or entre les mains lorsqu’il s’est lancé dans la réalisation de L’Antre de la Folie. Jouissant d’une reconnaissance certaine, qui lui permet de se lancer dans des projets plus personnels, il concrétise cet avantage par un film majeur, et d’une intelligence folle à tout les points de vue. Nous l’avions vu précédemment, les films adaptés des nouvelles de Lovecraft ne font souvent qu’effleurer la portée des écrits, volontairement parfois, c’est le cas de Re-Animator notamment. Mais ici, le cinéaste fait un choix absolument cohérent ; pas de mention de Lovecraft, pas d’adaptation d’un texte particulier, pas de citations de lieux ou objets cultes de l’auteur comme Arkham ou le Necronomicon. Ce qui intéresse John Carpenter, c’est l’essence de ce qu’est Lovecraft. C’est ce qu’il y a entre ses mots. C’est cet indicible terrifiant, décalé, qui vient bouleverser une réalité en y introduisant une folie progressive. Le réalisateur réussit le tour de force de mettre en scène ce qui ne peut pas être filmé. Il y a dans chacun de ses plans, dans chaque regard et chaque situation, la sensation qu’enfin on capte l’indescriptible que s’emploie à suggérer l’auteur aussi fréquemment. Il est difficile d’exprimer par de simples mots la façon dont John Carpenter parvient à happer le spectateur dans un univers malsain où se mêle la réalité et l’innommable, tout juste peut-on affirmer que la sublime réalisation du maître de l’horreur y joue sans doute une énorme part. Le monde est en pleine destruction, la logique en pleine déconstruction, la caméra devient une fenêtre vers une réalité cauchemardesque dépassant de loin toute idée de rationalisation. Comme dans la majorité des nouvelles de Lovecraft, la rencontre avec les forces occultes va pousser à une folie consciente, pour celui qui a vu ce que les Hommes ne devraient jamais voir. John Trent est campé par un Sam Neill impressionnant, naviguant entre plusieurs dimensions tout en jouant de manière assez vague pour perdre le spectateur comme se perd le personnage. Une caractérisation fort bien pensée et retranscrite à l’écran ; ainsi, on s’attache au héros sans pour autant perdre de vue qu’il n’est guère qu’un prétexte pour que John Carpenter nous entraîne dans son village fantôme absolument terrifiant, et filmé d’une main de maître (..)

La critique de L'antre de la folie fait partie d'un dossier consacré à H.P. LOVECRAFT, à découvrir sur Le Blog du Cinéma
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le 22 janv. 2015

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