Avec ou sans toi tout est tranquille, Bobby - enfin truc - Kit ?

Terrence Malick, l'homme aux cinq films adulés en 38 ans, a commencé sa carrière comme journaliste, avant de très vite entrer à l'American Film Institute et côtoyer des producteurs. Il intervient comme script doctor sur L'Inspecteur Harry et est chargé d'une commande qui n'aboutit pas. Peu après il réalise, à 28 ans, son premier film : Badlands, inspiré de la balade meurtrière de jeunes amants du Middle West en 1957. Sissy Spacek (Carrie) et Martin Sheen interprètent ce couple atypique et mal assorti.


Elle est la fille d'un peintre, une gamine un peu étrange et isolée. Il est éboueur sans avenir, le petit paumé à la belle gueule flirtant avec la délinquance. Il l'approche, elle sait que son père ne voudra pas, mais elle cède sans la moindre résistance car le processus est engagé. Lui est possessif et dur, une bizarre combinaison de trivial rude et de rebelle stoïque. Il ne supporte pas que son beau-père de circonstance le repousse et le dénie : il le tue, sans méchanceté, par instinct. Ils doivent partir, pour s'aimer ce sera ailleurs.


Le road-movie commence et tous les deux s'évadent pour des instants chastes et contemplatifs. Malick introduit leur rapport à la Nature, eux deux seuls et les paysages immenses sur lesquels les Hommes n'ont encore pas de prise. Toute sa signature est là, tant pour le soin de la photo et des prises de vue, l'usage de paysages mirifiques, mais aussi la vision très originale de Malick. Bonnie and Clyde version Malick est lunaire et spirituel, installe le couple malickien où l'homme est en charge des affaires du réel et se montre plus ou moins affecté, plus ou moins sauvage, la femme étant la créature dévouée et évanescente avec l'ascendant moral et la vertu intrinsèque.


Ici monsieur est un petit prolo sobre devenant prédateur avec son fusil : qu'il tire soudainement sur les gens est normal et doit rester inexpliqué pour elle comme pour nous – c'est dans le texte ; puis c'est justifié parce qu'il faut « tuer tous les témoins ». En face, madame est la bonne âme perdue heureuse de trouver quelqu'un s'intéressant à elle. Elle s'obstine à le trouver peu violent, même si elle remarque que somme toute, elle connait peu de choses sur lui et son parcours. Et puis comme lui s'est grillé, qu'elle le sait, elle a au moins les bénéfices du fatalisme. Elle s'en sortira et pourra rester le museau aéré entre rêveries et tâches assignées.


https://zogarok.wordpress.com/

Créée

le 15 janv. 2015

Critique lue 441 fois

3 j'aime

2 commentaires

Zogarok

Écrit par

Critique lue 441 fois

3
2

D'autres avis sur La Balade sauvage

La Balade sauvage
Velvetman
8

Le nouveau monde

Le vide magnifique des grandes plaines américaines est devenu le refuge de deux amoureux dont rien ne peut séparer, symboles d'une jeunesse un peu perdue mais qui veut perdurer. Les champs de blés,...

le 27 févr. 2015

72 j'aime

8

La Balade sauvage
Sergent_Pepper
9

West wide story

La fuite des amants criminels est un motif qui, depuis l’âge d’or du film noir, est devenu un genre en soi. A la fin des sixties, sous l’impulsion de Penn et de son séminal Bonnie & Clyde, qui...

le 2 oct. 2018

62 j'aime

11

La Balade sauvage
Kalian
5

Critique de La Balade sauvage par Kalian

Il serait vain de nier la réussite formelle que représente ce film. Une photographie magnifique, une musique extraordinaire, des paysages somptueux, une réalisation bien classe, une interprétation...

le 31 oct. 2010

52 j'aime

7

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

49 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2