Personnellement, je n’avais pas vu ses deux premiers films (un affront que je vais m’empresser de réparer au plus vite), ce qui réduit mes possibilités de replacer Laurence Anyways dans le contexte de la filmographie du cinéaste. Pourtant, j’ai de mes yeux de néophyte émerveillée découvert Dolan ; j’ai aimé ses obsessions à l’écran, ses manies, cette prétention qui dégouline de la pellicule pour mon plus grand bonheur. Comme je l’ai déjà dit, j’aime les réalisateurs prétentieux lorsqu’ils maîtrisent la fluidité de leur oeuvre : même les ralentis sur sons pseudo-hype, les délires mélancoliques et contemplatifs, le kitsch assumé… et les belles émotions, douloureuses, authentiques, grandioses sans racolage.

Laurence Anyways est un BEAU film. Un film qui m’a prise aux tripes avec son histoire poignante, ses acteurs atypiques, le tout rythmé par les accords oniriques de Noia et un choix de chansons ultra-personnel, vivant et crucial à la création de son univers bien particulier.

C’est tout simplement un film sur deux personnes qui s’aiment tellement qu’elles ne peuvent pas faire le deuil de leur relation, quels que soient les obstacles gisant en travers de cet amour impossible. Pendant 10 ans, nous verrons les évènements et le quotidien qui pourrait être celui de n’importe quel couple, dans lequel nous nous reconnaissons. Sauf que la raison de ces crises est quelque chose qui semble, au vu de ce qu’ils ont été auparavant, insurmontable. Un homme veut devenir une femme, être celle qu’il a toujours été …sans jamais oser l’être, avec les crises personnelles que cela implique, et les bouleversements subits par son couple.

Le pire, c’est que l’enfer, ce n’est pas tant la biologie, le maquillage, les robes et l’imperceptible changement de timbre de voix. L’enfer, c’est les autres ; ce sont les conventions, l’étiquette, les regards, la bienséance, l’intolérance. Parfois, oui parfois, il en fait un peu trop, mais on lui pardonne volontiers sa grandiloquence, l’intensité des émotions de Suzanne Clément prises de plein fouet, ou l’arrogance de Melvil Poupaud.
Sans en faire une analyse sociale, et en restant dans l’émotion pure, Laurence Anyways te met une grosse claque. Tu en ressors tremblant et épuisé, comme si tu avais eu à vivre le drame qui s’est déroulé devant tes yeux.
Filmosaure
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le 9 déc. 2012

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Filmosaure

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