Autant que cela puisse surprendre, je ne suis pas un familier des films de Miyazaki. N'ayant pas encore vu Princesse Mononoké, Le château dans le ciel ni même Porco Rosso, je n'avais, jusqu'alors, jamais vraiment compris ce qu'il y avait de si génialement spécial - ou spécialement génial - chez ce bonhomme.
Heureusement, il n'est jamais trop tard pour s'y mettre.
En premier lieu, c'est visuellement superbe: la qualité des dessins est irréprochable, et le travail apporté sur l'environnement permet une immersion immédiate. Miyazaki apporte ici un soin tout particulier à la modélisation d'un monde merveilleux où les bateaux volent, où les maisons se déplacent sur des pattes métalliques, où les feux de cheminée s'animent et parlent comme des personnes et où les épouvantails font d'excellents compagnons de route. Le contraste entre réalisme et conte de fée est on ne peut plus maîtrisé, tant le charme opère à merveille.
Scénaristiquement, c'est un peu plus spécial: si le message global du film peut ne pas sembler très clair dès le premier visionnage, les thèmes abordés, eux, le sont. Les clichés du conte de fée classique apparaissent comme étant subtilement bousculés (le magicien est beau et charmant mais aussi égoïste et vaniteux, la méchante sorcière, malgré ses actions, est finalement plus à plaindre qu'à blâmer...) tandis que la bêtise humaine est elle clairement dénoncée, notamment à travers une guerre dont la raison n'est pas ou peu expliquée (ce qui appuie profondément sur son aspect inutile et meurtrier), mais aussi des sentiments humains (jalousie de la Sorcière des Landes, cruauté des dirigeants, etc.)
Mais c'est surtout le principal de tous ces thèmes qui nous intéresse. Au travers du maléfice qui frappe la jeune et courageuse héroïne (et la fait vieillir prématurément), le réalisateur montre la vraie beauté de l'être humain. Celle-ci prend alors une forme inattendue : d'abord symbolisée par la sagesse - rimant avec vieillesse - , puis par l'amour. C'est par cet amour que Sophie retrouve peu à peu sa jeunesse et sa beauté et parvient à sauver la vie de son bien-aimé. L'amour, victorieux, apparaît donc sous les traits de la jeunesse, légère et insouciante, bien que celle-ci soit également montrée sous son aspect le plus sombre, c'est à dire impulsive, bestiale et insensible (la transformation progressive et symbolique de Hauru en un effrayant monstre ailé).
Certes, l'on peut reprocher au style du réalisateur nippon d'être encore un peu dur à appréhender par tous - moi en premier -, et même parfois assez déroutant. Mais comment ne pas être séduit par cette animation si réussie ? Comment ne pas tomber sous le charme de cette romance magnifique entre les deux jeunes gens ? Comment ne pas se laisser submerger par la sensibilité des rapports entre les personnages qui apprennent à se connaître, à vivre ensemble et à s'aimer ? Enfin, comment ne pas se laisser séduire par cette bande-son si inspirée et enchanteresse ?
Indéniablement, Le Château Ambulant est une belle réussite, un véritable bijou de charme et de fantaisie à mettre entre toutes les mains. Quant à savoir s'il s'agit de la plus belle oeuvre de Miyazaki, il est peut-être encore un peu tôt pour le dire; en tout cas pour ma part, coup de cœur certain !