Le Château ambulant
8
Le Château ambulant

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (2004)

Vert.
Les landes, paysage à la beauté paisible, venteuse, s'ouvrent sous un brouillard épais. Dans une petite ville bordant les montagnes, la fumée des machines prend le relais poisseux de la brume naturelle. Fanfares, foule en fête, places bondées font frissonner les pavés au-dessus desquels un couple voltige gracieusement.
Frappée d'une malédiction l'enfermant dans un corps presque centenaire, la jeune Sophie s'exile au coeur des montagnes verdoyantes. Machine invraisemblable, un tas de tôle articulé s'y meut au sommet de deux jambes mécaniques. Refuge ambulant, logis prodigieux, tenu à la force d'un feu sacré, il arpente les landes au nom de son propriétaire, le magicien Hauru.


Bleu.
Les effluves du port accompagnent le réveil de Sophie. Au bord de la mer, le soleil brille sur la façade de la nouvelle location de ce château magique et de sa porte enchantée. Une couleur, un endroit. Les bruits de fête y sont vite écrasés par l'horreur.
La mer ramène à la ville les cadavres de ses héros. Bâtiments partis en grande pompe vers une guerre horrible, ils reviennent tels des épaves désertées, abimées, surveillés par d'immenses aéronefs.


Noir.
Dans un ciel flamboyant, les explosions déchirent le silence. La guerre éclate dans toute son absurdité et toute sa violence, portée par la puissance de sorciers soldats.


Rouge.
La métropole brûle d'activité. Au milieu d'une foule mouvante, deux vieilles dames escaladent un escalier sisyphéen. En haut, tête pensante du conflit, une magicienne au service du roi tire les ficelles pour détruire Hauru et son château.


Vert.
Lacs, plaines verdoyantes, pentes herbeuses voient défiler ce château bancal. Fuyant la guerre, il bruisse de vie et de tendresse, bien qu'en son sein un homme se transforme progressivement en monstre. Epuisé par la brutalité des conflits, Hauru peine à quitter son corps de bête, criblé de plumes, enferré dans sa solitude.


Noir.
Les bombes pleuvent sur la ville. Le feu rugit dans le ciel, les avions sèment le malheur. La cité n'est plus qu'un immense tombeau où se dresse encore un monceau de tôle fuyant les explosions.


Jaune
Quelque part loin du conflit, une vallée exhibe encore la quiétude d'un cours d'eau cerné de fleurs. Centré par une minuscule mansarde, ce jardin secret, refuge paradisiaque de Sophie et Hauru, croise finalement la route des combats. Un monstrueux dirigeable s'écrase en plein Eden.


Vert.
La pluie des landes chasse les dernières poussières des restes du château ambulant. Sabordé, détruit, il s'effondre dans un immense fracas.


Noir.
Explosions et incendies rythment une nuit sans ténèbres. Les bombes s'amoncellent dans le ciel avant de cracher leur souffle dévastateur au ras du sol. Feu et blast détruisent les restes d'un pays en détresse.
Haut dans le ciel, des hommes criblés de plume, masqués par un épais manteau, dirigent leur masse souple, agile, au coeur des vaisseaux ennemis. Dans une chorégraphie aérienne macabre, ils s'anéantissent au nom d'une haine incompréhensible.


Noir.
Tout s'écroule. Le monde s'effondre, le château aussi, jusqu'à ne plus présenter qu'une échappatoire, une porte.
Sous une nuit où les étoiles se décrochent du ciel et frappent le sol en gerbes d'étincelles, Sophie perce le secret de Hauru au coeur de sa jeunesse.


Flash.
Une dernière étincelle vient illuminer le ciel. Résolution instantanée au nom de l'amour, l'abolition des apparences. Chacun se dirige vers un avenir apaisé.
Dans un château flânant au-dessus des nuages, leur avenir se teintera de la couleur des masses floconneuses qu'ils surplombent.
Blanc.

Créée

le 7 janv. 2017

Critique lue 670 fois

32 j'aime

10 commentaires

Black_Key

Écrit par

Critique lue 670 fois

32
10

D'autres avis sur Le Château ambulant

Le Château ambulant
SBoisse
9

« Et v’la le feu qui cause ! »

Il était une fois un sorcier qui se refusait à grandir et qui, par générosité, s’était privé de son cœur. Avouons que Le château ambulant n’est pas d’un abord aisé. Ce long métrage tient une place à...

le 20 déc. 2017

78 j'aime

16

Le Château ambulant
villou
8

Un château aux multiples facettes

Je trouve que pour ce film, Miyazaki est allé exactement là où on ne l'attendait pas. Le film est complexe, torturé, parfois incompréhensible, surtout pour des occidentaux. Mais ma première remarque...

le 21 déc. 2010

75 j'aime

3

Le Château ambulant
Fritz_the_Cat
9

Les Malheurs de Sophie

Il faut du temps pour mesurer l'ampleur d'un film comme Le Château ambulant, y compris pour qui est habitué à se perdre dans la filmographie de Miyazaki. Visiblement peu contenté par ses propres...

le 2 nov. 2015

74 j'aime

14

Du même critique

What a Wonderful World
Black_Key
9

Time for hope

Ce matin, j'ai pas envie de rigoler. Ce matin, j'ai une sacrée gueule de bois. Pas du genre qu'on fait passer en buvant je ne sais quelle mixture miracle, pas du genre qui attaque le foie en même...

le 14 nov. 2015

132 j'aime

10

Il était une fois en Amérique
Black_Key
10

Brumes et Pluies

Le temps passe. Facilement, il se confond et perd sa structure. Les souvenirs, regrets et joies se mélangent et forment un dédale infini. Les époques se recoupent, se font écho. Elles s'entrelacent...

le 17 déc. 2015

87 j'aime

23