Finalement, la seule chose que Leconte présente à son comptoir, c'est de la puérilité et de l'ennui.
Dire que j'attendais Le Magasin des Suicides serait un doux euphémisme, dans la mesure où le thème et son approche avaient tout pour me plaire. Et comme certains le savent ici, je suis friand d'humour noir. Il s'agit là pour moi d'une des plus grosses déceptions de l'année, et je m'explique.
Au vu des nombreux propos de Patrice Leconte, il s'agissait là d'un film assez ambitieux. Un film d'animation basée sur une technique visiblement "inédite", traitant d'un sujet pas nécessairement évident, le tout saupoudré d'un humour noir que l'on attendait trash. Le problème, c'est que le film n'est pas tout à fait ça. Le film est profondément gamin, et manque justement de cette ambition.
Rentrons dans le vif du sujet en attaquant le premier défaut : l'écriture. Elle est vraiment absente. Passé le "pitch" de base, l'intrigue est faible et le scénario souvent absent. Le film s'enchaine d'une manière un peu grotesque, sur des évolutions qui ne tiennent pas, la faute à une écriture des personnages aussi un peu à la rue. Les enjeux des personnages ne sont pas représentés, ni travaillés. Idem pour les dialogues : c'est pas terrible la plupart du temps, et c'est assez mauvais dans l'ensemble pour l'écriture des chansons. Mais quel dommage, quelle hérésie ! Un sujet en or comme ça, tout passe par l'écriture des dialogues, il faut que ça soit aiguisé comme une lame de rasoir, et que ça tranche net. Tant pis s'il y a des mécontents. Car c'est un peu le problème du film : je pensais avoir affaire à un film d'animations pour adultes, mais c'est finalement un peu ouvert à tout le monde et pensé aussi pour les plus jeunes. Du coup, ça n'ose pas grand chose, et la "réflexion" sur le suicide n'est pas poussée, elle est d'ailleurs bien convenue. L'humour est convenu, la violence physique et morale est convenue aussi. Potentiel en or gâché.
Du côté de la réalisation, il y a des choses intéressantes, car le film n'est pas moche. La technique de "2D en 3D" offre certaines perspectives intéressantes, mais n'est pas toujours utilisée de manière folichonne ou originale. Derrière une direction artistique qui a l'air chouette à première vue (mais qui se révèle bien vite limitée), on peut observer une sorte de cache-misère en ce qui concerne l'animation. Certains diront que c'est le style. Mais bof quand même.
Je parlais de l'écriture des chansons, parlons désormais de l'écriture des musiques les accompagnant : c'est aussi assez faible. A part la toute première qui est sympa, elles m'ont vraiment saoulé dans l'ensemble. Ça surfe quelque part entre le pas inspiré et le déjà-vu, pour des harmonies qui frisent parfois avec une cacophonie assez limite.
Un autre point noir : les doublages. Le casting vocal est dans l'ensemble assez mal choisi, et fait même parfois amateur (certains tirent plus leur épingle du jeu que d'autres). Les intonations de voix sont hasardeuses, et le jeu n'est vraiment pas présent, ou complètement à l'ouest sous prétexte que "c'est dessin-animé".
C'est dommage, vraiment trop dommage. J'y allais tout guilleret car j'étais sûr d'y trouver un film "rafraichissant", et un peu nouveau en ce qui concerne l'animation Française. J'en ressors avec un film assez bête, convenu, et lourdingue, ce qui me frustre encore plus vu le potentiel. Un tel projet dans les mains de Jeunet, en imaginant qu'il aurait fait quelque chose se situant entre La Cité des Enfants Perdus et Delicatessen, j'aurais payé cher pour voir ça.
Alors peut-être que le film est moins mauvais que je ne laisse l'entendre, mais la déception m'emporte trop pour que j'exprime autre chose que des regrets.
