Seulement annoncé comme mieux que Ghibli
« Les enfants loups, Ame et Yuki », titre qui a le mérite d'être clair et simple. Juste en le lisant, on sait qu'on va suivre les « aventures » de 2 jeunes enfants mi-loups mi-humains du nom d’Ame et Yuki. Le reste, on le découvre assis dans la salle obscure face a l'écran qui reflète les images projetées, ou tranquille dans son canapé. Et c'est avec des yeux pétillants comme ceux d'un enfant qui va voir un dessin animé qu'on va suivre l'histoire d'une famille pas comme les autres. L'histoire d'une femme qui va tomber follement amoureuse d'un homme, qui se révèlera être un mi-loup mi-homme, et qui va se marier avec lui. En résulte, dans une logique des plus logiques, la naissance de 2 enfants qui vont avoir les capacités surnaturelles de leur géniteur : être mi-humain mi-loup. Comble de malchance, le père meurt peu de temps après durant une nuit malheureuse. S'en suivent les péripéties de cette jeune veuve qui aura toutes les difficultés du monde à élever ses 2 jeunes bambins, dans ce monde qui chasse et haït les loups. Vous l'avez compris, ce film est bel et bien une tragédie.
Encensé par le public et la presse, comparé aux titans indétrônables de la japanim : le studio Ghibli avec les maîtres incontestés Hayao Miyazaki (le Voyage de Chihiro, Princesse Mononoke, …) et Isao Takahata (Pompoko, le Tombeau des lucioles, …)… En tant que fan de dessins animés et des longs-métrages de qualité de japanim, et étant un jeune étudiant qui vient de finir ses études d'animation et qui va travailler comme animateur pour des boîtes comme Ubisoft ou Pixar, je me devais d'aller voir cette œuvre. Et je l'attendais assez impatiemment. En voyant les bandes-annonces, je m'attendais à de la poésie, de la romance, du rire, de la beauté, des pleurs et de la tristesse, et pourquoi pas quelques « scènes d'action ». Vu qu'on le comparait aux colossaux géants de Ghibli et à leur chefs-d'œuvre plus qu'acclamés, je me disais que j'allais pleurer de merveille devant une splendeur visuelle et technique de haute voltige. Que je n'aurais qu'une envie : retourner directement dans la salle de cinéma pour me reprendre une puissante claque visuelle, technique et artistique. Et comme on disait de lui qu'il avait un scénario original, plein de rebondissements, je m'attendais vraiment à être surpris à chaque instant. Que je me dise « Ah! Il va se passer ça » et qu'au final on me sorte l'opposé, voire même quelque chose de complètement à part et jamais vu. Du neuf quoi. Et qu'on me surprenne pour quelque chose de vraiment imprévu.
Et je fus en effet surpris. Surpris de cette déception. Surpris par les super bonnes critiques qu'il a reçues. On m'avait promis un chef-d'œuvre titanesque, égalant les plus grands maîtres incontestés. Tout le monde l'adorait, l'adulait et n'en faisait que des éloges. Et je me suis retrouvé devant une œuvre médiocre et très décevante en tout point.
Sur une base de scénario ultra classique à souhait (c'est pas comme si les hommes-loups sont légions et profondément ancrés dans la culture japonaise depuis des millénaires, tel le kitsune (esprit renard, quasi divinité) ou les plus modernes nekos (gamines aux oreilles et à la queue d’animaux, de préférence loup ou renard)), le scénario s'enchaîne de façon monotone et banale. C'est une romance comme les autres avec pour seule particularité que les enfants peuvent se transformer en loups. On connaît déjà trop bien l'histoire pour avoir vu et revu le même scénario type (la jeune femme tombe amoureuse et se marie, ils ont des enfants spéciaux, le père meurt, ….) et on devine la fin. Le film est en plus de ça porté par une mollesse soporifique causée par des plans trop longs, mous, et bien souvent inutiles. On n’est pas dans un film contemplatif à ce qu'on sache, on irait voir un documentaire sinon. Les mouvements de caméra, quasiment inexistants, sont pauvres, fades et dans la plupart des cas aucunement dynamiques. Le film use et abuse de réutilisations de plans, qui appauvrissent encore plus le dynamisme et le visuel global. Il utilise inutilement des vues sans raison, comme des fish-eyes sans intérêt, ajoutés à une vue en contre-plongée pas maîtrisée, réutilisés plus de 4 fois en moins de 20 minutes.
En supplément, on nous sert des dialogues pauvres, conventionnels et sans jamais une pointe d'humour réussie. Avec en complément des comportements totalement illogiques comme, par exemple, la scène où ils jouent tous dans la neige, toute la journée en... pyjama?! Oui, ils sont tous bien en pyjama en train de batifoler dans la neige. Et si c'était un pyjama d'hiver encore, ça passerait. Mais ils sont en pyjama d'été, en petit chemise de nuit toute légère qui ne protège pas du froid. Mais c'est quand plus de ça, tout semble parfaitement normal. Ils ne sont pas malades ou quoi que se soit, juste pas gelés d'un orteil. Allez quasiment nus dans la neige durant une journée. On verra bien comment vous arriverez à l'hôpital. Encore, pour les 2 enfants ça peut passer, se sont des mi-loups tout de même, on peut accepter, mais pas pour la mère qui est (je le rappelle) une humaine parfaitement normale et maigre comme une brindille de blé qui a manqué d'eau pour se développer!
Surtout, ne vous attendez pas à verser la moindre larme tant les personnages sont inintéressants et au caractère lambda, ajoutés à un design grossier, mais on y reviendra. Aucune empathie, aucun lien ne se créé entre les protagonistes et le spectateur qui n'arrive à aucun moment à plonger dans l'univers. Ne comptez pas sur la musique, qui passe inaperçue, pour vous transporter, on n’est pas avec du Hans Zimmer ou du Joe Hisaishi (compositeur du studio Ghibli). Si vous voulez un film triste magnifique, un chef-d'œuvre qui reprend pour thème la vie courante, regardez plutôt « Oseam ». On y retrouve le même thème, la même catégorie de film, et certaines scènes des Enfants Loups, mais parfaitement maîtrisées et transportées par une musique de qualité, même les moins sentimentaux ne peuvent résister.
Le seul point positif, on ne peut le nier, sont les décors et paysages qui sont vraiment de toute beauté. Ils sont fouillés, détaillés, aux couleurs magnifiques, vous tomberez immédiatement sous le charme.
Le reste en revient à la médiocrité et à la banalité qui caractérisent le film. Les designs des personnages sont clichés, leurs traits grossiers, plats et fades. Ils n'ont aucune consistance visuelle, aucune accroche intéressante pour l'œil. On se désintéresse d'eux rapidement tellement ils sont lambdas et s'intègrent mal dans le décor. Que se soient les humains ou les loups. Les visages sont inexpressifs à souhait. Leurs vêtements, sans véritable recherche, sont plats et minimalistes. Et la mise en couleur n'arrange rien. On se retrouve avec des aplats basiques avec une simple couleur, pas toujours très jolie d'ailleurs, pour chaque élément. La peau est de telle couleur, les vêtements de telle couleur, etc…
Là où les personnages du studio Ghibli ont tous une recherche graphique poussée, avec un véritable caractère visuel propre, un niveau de détails géré comme il le faut et une mise en couleur de qualité, même si parfois simple, les Enfants Loups fait dans la facilité et le minimalisme sans défi, ni ambition et n’utilise que des codes classiques.
Et si seulement l'animation nous faisait rêver? On pourrait lui pardonner ses défauts. Mais je me désole en lisant les commentaires tels que : « est un éloge à l'animation, dont les couleurs ... » (si si, je vous l'assure, de nombreuses critiques ont fait le même genre de phrase), mais chers spectateurs, l'animation n'a rien a voir avec les couleurs. Quand on parle d'animation, on parle de la silhouette du personnage, de la ligne d'action, des poses fortes, du dynamisme de la pose et du mouvement en général. Et pour le coup, l'animation de ce film est rigide et froide. Les mouvements déjà raides sont saccadés, sans fluidité. Les visages sont peu expressifs, et les corps n'ont aucune pose forte intéressante, ni de ligne de force prononcée. Sans parler du pire : les boucles d'animation qui sautent et s'enchaînent mal, telles que la marche. Parce que même la base, ma toute base de l'animation (le cycle de marche), ils ne savent pas le faire correctement. Même les choses les plus importantes de l'animation (comme le poids) sont bâclées. Même des dessins animés en série ont des animations de bien meilleure qualité. Prenez par exemple Avatar le dernier maître de l'air, ou la saison 2 Korra le dernier maitre de l'air, ou Samurai champloo – pour rester dans le dessin animé asiatique, parce que j'aurais pu énoncer Wakfu pour les français (certains épisodes de Wakfu sont d'ailleurs faits au Japon). Comparez. Et je ne parle même pas des longs-métrages. Les gens rapportent l'animation du film a du Ghibli, ou du Disney. Mais il n'y a aucun rapport.
En bref, un film décevant de par sa qualité globale médiocre et qui ne mérite pas autant d’éloges et de critiques à ce point positives. Qui ne mérite pas d'être comparé à d'autres superbes chefs-d’œuvre (Ghibli, Disney, DreamWorks, …).
Et si seulement ce n'était qu’à cause de mon œil du métier qui me faisait penser tant de mal de cette déception? Mais non, même de jeunes enfants (à l'esprit bien, bien moins critique je le rappelle) sont sortis déçus du film. Ils disaient qu'il n’était pas terrible, que tel ou tel film était bien mieux.
