Après les mers via Océans et les airs avec Le Peuple Migrateur, le tandem Perrin/Cluzaud propose aux spectateurs une immersion sur terre, dans les forêts. L'expédition consiste à parcourir 12 000 ans d'Histoire de la Nature (de la fin de l'ère glaciaire à aujourd'hui) aux côtés des animaux, avec des territoires représentatifs d'une pureté passée, en partie entamée. La domestication de certaines espèces, les progrès de l'agriculture et les ravages de l'industrie sont aperçues. Les commentaires sont rares, l'heure n'est pas aux explications et surtout pas à mettre en lumière les mœurs (révolues ou non) de l'Humanité.


Volontairement aléatoire, le récit tient en un enfilage de saynètes – comme dans la série Minuscule, mais avec un panel bien plus large : écureuils, chevaux, cerfs, canards, myriades d'oiseaux, ours, loups, renards, etc. Tous se croisent, participent (par instinct et/ou inadvertance) à des séquences communes sans que ne soient générés concerts artificiels, ou forcées les projections. Le montage invente ouvertement quelques touches d'humour humanisant (comme l'usure de Madame Ours), mais refuse l'instrumentalisation directe dans l'ensemble. L'effet malheureux à la clé : le spectateur est plongé dans la passivité, sans matériel adéquat pour les manipulations mentales, sans suspense ou continuité pour s'égayer.


Le film explore sans se poser ; il faudrait des découvertes ou de l'insolite pour compenser, ces morceaux sont bien rares (une danse d'oiseau tout de même). Il s'en tire honorablement en terme d'animation grâce à quelques pics d'intensité, ou des relances efficaces, toujours calmes et assurées. Perrin et son équipe ont eu la volonté louable de donner à voir les animaux de près et 'pleinement', en laissant l'humanité et ses tribulations au vestiaire. Cette ambition est accomplie mais son horizon est assez pauvre, rempli d'angles morts. Le point de vue est non-anthropocentrique mais Les Saisons ne se trouve pas de relais stable, donc pas de regard profond sur les constantes et les aléas mis en lumière.


Le mode 'zapping' prive donc d'une maturation claire et ne parvient pas à éluder l'ennui, mais a le mérite de la générosité. Il alimente la machine à éblouir sans recourir au merveilleux. Finalement Les Saisons remplit brillamment sa fonction 'cinéma', en laissant des images propres et distinctives ; comme dans les deux précédents opus (surtout Océans), la qualité de la photo est remarquable, digne d'en faire un 'cas d'école'. L'expérience s'achève sur un constat alarmant, « l'apprenti sorcier » (l'Homme) déréglant les saisons. En voix-off Perrin plaide pour une alliance entre les animaux et les Hommes. La démonstration était belle, les suggestions pratiques, économiques et politiques manquent.


https://zogarok.wordpress.com/

Créée

le 17 juin 2016

Critique lue 410 fois

1 j'aime

1 commentaire

Zogarok

Écrit par

Critique lue 410 fois

1
1

D'autres avis sur Les Saisons

Les Saisons
nostromo
8

Into the wild...

Si on aime les animaux, il est difficile (mais guère impossible , au vu des notes ici...) de ne pas aimer un tel film, qui nous fait plonger au cœur de la vie des forêts primitives européennes et...

le 10 févr. 2016

7 j'aime

3

Les Saisons
Behind_the_Mask
7

Nature morte ?

La Nature s'éveille et frissonne sous la rosée du printemps. Les premiers rayons du soleil la réchauffent. Mais la forêt, elle, déborde déjà de vie et d'activité. Le hérisson part en vadrouille sous...

le 6 févr. 2016

7 j'aime

3

Les Saisons
Ashtrayjune
9

Le pouvoir des images, du montage, de la musique et...des animaux.

Dans un documentaire, l'homme est toujours omniprésent, il donne son point de vue, il conte une histoire, explique une évolution, évoque les pours et les contres de tel ou tel sujet, parle des...

le 28 janv. 2016

5 j'aime

1

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

49 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2