C'est le deuxième des films anti-nazis réalisés par Fritz Lang aux USA pendant la Seconde Guerre Mondiale. Et, à mes yeux, c'est le meilleur.
Le film part d'une histoire authentique, qui, au même moment, inspirait un autre film, Hitler's Madman, réalisé par Douglas Sirk : l'assassinat de Reinhardt Heydrich, le terrifiant représentant du Reich en Tchécoslovaquie. Sauf que, chez Lang, Heydrich lui-même n'est pas le sujet du film : il n'apparaît que dans la première scène.
Ce qui intéresse Lang, c'est l'affrontement entre les autorités d'occupation et le peuple tchèque. Les Nazis vont mettre en place un odieux chantage : l'exécution d'otages pris au hasard dans le peuple, de façon régulière, tant que l'assassin ne s'est pas rendu ou n'a pas été dénoncé.
Lang en profite alors pour lancer une réflexion fascinante sur la notion de sacrifice, pendant que le piège nazi se referme d'une façon qui paraît inexorable.

Le scénario, co-écrit par Bertolt Brecht, contient une part inévitable de propagande (la seule partie un peu lourde du film). Mais, de nos jours, on peut le voir comme un formidable polar, magnifiquement organisé. Ce film est une machine implacable, où tout intervient de façon inévitable. Chaque scène est strictement indispensable à l'intrigue, rien n'est en trop. La quasi absence de musique renforce encore le caractère angoissant de l'ensemble. La mise en scène est terriblement efficace, Lang alternant des scènes réalistes et d'autres expressionnistes ; à bien des moments, j'ai pensé à un autre chef d'oeuvre, Le Testament du Docteur Mabuse, tant par la construction que par la réalisation.
Lang déploie aussi une incroyable maîtrise du rythme. Alors que le film est plutôt long pour une production de l'époque, il est prenant d'un bout à l'autre. Le cinéaste prend le temps de développer la situation cauchemardesque où sont enfermés les héros et le peuple tout entier, mais sans jamais ennuyer son spectateur.

SPOIL
Quant au final, il s'agit de retourner la parano nazie contre eux. Les occupants sont donc pris à leur propre piège.
FIN DE SPOIL

Un véritable régal. Plus que tout autre, Fritz Lang mérite l'appellation de Maître du suspense.
SanFelice
9
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le 29 août 2012

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le 29 août 2012

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SanFelice

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