On ne l'arrête plus Soderbergh ! Toujours à fond dans sa passion, avec une idée à mettre en scène. Alors que son dernier film, Piégée, sortait chez nous début juillet (et en début d'année aux USA), voilà qu'un mois plus tard on le retrouver aux commandes de ce Magic Mike. Et il a déjà deux autres longs-métrages de prévus pour 2013, il n'a jamais été aussi actif, même si la qualité de ces précédentes œuvres laissait souvent à désirer.
Inspirée par l'expérience de Channing Tatum dans sa jeunesse en tant que strip-teaseur, l'histoire se focalise donc sur ce monde de la nuit, tout en tentant de construire des connexions autour. Même si la comparaison peut paraître grossière, et pas forcément la plus adéquate, j'ai eu l'impression d'avoir affaire à un Projet X mature, qui ne se contente pas de faire fantasmer les pré-ados mais aborde cette ambiance de fête, d'alcool, de femmes, et beaux mecs aussi, avec une œil plus artistique (pas trop non plus), tout en ayant un peu de valeur dans le fond. Jamais on a vu Channing Tatum jouer de la sorte. Sans délivre une prestation à oscar, il livre une composition très juste et approfondie pour son personnage. Idem pour Alex Pettyfer, ce qui le change de Numéro Quatre et son apparition furtive dans Time Out. Matthew McConaughey est à fond dans son rôle et semble s'amuser comme un fou, tandis que l'actrice féminine principale, Cody Horn, offre une bonne complémentarité à son duo avec Channing.
Dans ce film, il n'y a pas de méchant, ni de gentils. L'on suit juste le cheminement personnel et la phase de vie d'un trentenaire, et des personnes qui gravitent autour de lui, lorsqu'il prend un ado sous son aile. Ainsi, tandis que l'un cherchent à se construire un avenir sérieux, l'autre est tout à coup projeter dans un monde de libertés extrêmes et compte bien en profiter. Il n'y a pas de drama disproportionné, ni de leçons de morales, ni d'exagérations de comportements pour le plaisir du cinéma, et comme on aurait pu le voir dans d'autres films traitant du même milieu. Soderbergh, lui, pose l'histoire telle qu'elle est et a le mérite de ne pas monopoliser tout l'écran par une relation amoureuse traitée très subtilement et sympathiquement. On aurait tout de même apprécié davantage d'approfondissement sur l'intrigue ou les relations entre les personnages qui demeurent assez sommaires et permettent juste d'enchaîner entre les scènes plus torrides des stripteaseurs. Ce qui nous est présenté n'est toutefois pas du comblement par le vide, arrache par moment quelques rires, et provoque de l'empathie envers les personnages, mais ça reste en surface. En fait, le film semblent vraiment se développer en touchant à sa fin, avec l'approche des dernières scènes totalement compréhensible vis-à-vis de l'histoire, cependant il subsiste cette envie d'en savoir davantage.
Sinon, comme à son habitude Soderbergh touche à tout et est en charge des trois postes principaux dans la création du films. Montage, photographie, réalisation. Sur ce long-métrage, il joue pas mal avec ses filtres et teinte sa pellicule de tons très cinématographiques pour imposer des contrastes entre les deux univers où se déroule l'action. D'un côté des tons jaunes orangés pour les scènes de jour en extérieur, qui renvoie un aspect à la fois assez chaleureux mais également morne, et de l'autre, pour la vie nocturne et les clubs, c'est une tournure plus bleutée qui s'accapare la pellicule, histoire de titiller la rétine. La réalisation est, sans surprise, soignée, plutôt posée ; c'est presque une formalité pour Soderbergh qui sait donner cette optique assez artistique à des scènes banales, avec des prises de vue étonnantes et renversantes. Le rythme est bien cadencé, tout s'enchaîne avec fluidité passant d'une ambiance à l'autre, et sait garder l'attention du spectateur.
Pas de compositeur attitré cette fois-ci pour la bande musicale, mais toujours un choix judicieux et réfléchi des musiques qui parcourent son œuvre. Steven Soderbergh sait les utiliser à bon escient, sans non plus en garnir toute sa pellicule pour, par exemple renforcer les scènes mélo par des embardées de violons ou piano. Au contraire, il laisse justement la place à l'authenticité des dialogues et la plupart des scènes de vie quotidienne qui se retrouvent accompagnée de leur environnement ambiant. Les musiques interviennent donc principalement lors des nuits agitées, en empruntant à des artistes Electro, Hard Rock, Pop et R&B, ou quelques titres plus Indie et Hip Hop. L'ambiance est bonne, leur intégration également, et elles rythmes très bien les excellentes chorégraphies des acteurs.
Ce nouveau Soderbergh relève un peu à la tête par rapport à ces dernières réalisations. Il se dégage une bonne humeur certaine du film, malgré un fond plus sérieux qui interpelle mais n'est clairement pas assez élaboré. L'on est encore loin du travail scénaristique des ces long-métrages les plus connus. En définitive, Soderbergh continue de faire du Soderbergh moderne, enchaînant les idées sans prendre le temps de vraiment les concrétiser.