Voilà un film de John Ford de 1953 se passant, une fois n'est pas coutume, en Afrique. Mais s'il est question de safari, là n'est pas l'essentiel, même si le cadre est important. Il s'agit avant tout d'une ou de plusieurs histoires d'amour entre trois personnages incarnés par Clark Gable, Ava Gardner et Grace Kelly.

Clark Gable incarne un entrepreneur implanté en Afrique de l'Est pour capturer des animaux et les revendre ensuite à des cirques ou des zoos. C'est un dur à cuire à la fois séducteur et brutal, charmeur et goujat, franc et cynique. Un personnage plus subtil qu'il n'y paraît, pas si sûr de lui, un peu ambigu.

Face à lui, deux superbes femmes, engagées dans un duel au soleil pour l'amour de l'aventurier : une blonde, jouée par Grace Kelly, et une brune, interprétée par Ava Gardner ; une bourgeoise et une fille du peuple ; une fille distinguée et une garce ; le langage châtié contre l'argot ; la retenue contre l'exubérance. Le tout dans un environnement hostile. Laquelle va réussir à l'emporter ? La femme mariée, qui s'éloigne d'un mari qu'elle n'aime pas ou la fille célibataire ?

Quoiqu'il en soit de l'issue du film, Ava Gardner est rayonnante avec son aisance, sa gouaille, son ironie mordante, ses manœuvres et son côté langue de vipère. Elle joue la jeune écervelée, mais elle est plus intelligente qu'elle ne le laisse transparaître.

La vision de l'Afrique et des Africains dans ce film est assez neutre : il n'y a pas de propos politiques, pas de dénonciation ou au contraire de soutien acharné au colonialisme, il n'y a pas trop de mépris non plus de la part des personnages anglo-saxons envers les Africains dans le film. Les participants africains au film sont remerciés dès le début, mais aucun d'entre eux ne figure dans le générique de fin, alors que le principal serviteur de Marswell aurait pu y être. Les Africains, même cantonnés dans le film à des rôles et responsabilités mineurs, sont en tout cas plutôt valorisés, présentés dans leur beauté, magnifiés par leur musique.

Vers la fin, les scènes avec les gorilles, qui étaient bien sûr très complexes à tourner, sont très décevantes, du fait du grand décalage entre les scènes tournées en Afrique et celles réalisées en studio. L'alternance en champ-contrechamp entre ces deux types de scènes est complètement ratée du fait de la grande difficulté, vu les moyens de l'époque, de recréer artificiellement et de façon réussie le décor de la forêt tropicale filmé sur place. Ces scènes gâchent un peu une très bonne impression d'ensemble avec de beaux paysages et de belles lumières, et de beaux passages avec les animaux, ce qui donne par ailleurs un côté documentaire au film.

Il n'en reste pas moins qu'on a là un très bon film, très agréable, avec de l'humour, des dialogues truculents et souvent à double-sens, notamment de la part d'Ava Gardner, de beaux costumes, de superbes musiques, tirées uniquement de chants et de musiques africains, des plans de toute beauté et un trio d'excellents acteurs : un Clark Gable diablement séduisant, une Grace Kelly bouleversante et une Ava Gardner pétillante.

Créée

le 6 juil. 2011

Critique lue 1.1K fois

9 j'aime

26 commentaires

socrate

Écrit par

Critique lue 1.1K fois

9
26

D'autres avis sur Mogambo

Mogambo
Torpenn
6

Ava, je ne te hais point

En 1932, Ava Gardner, dix ans, regarde La Belle de Saïgon au cinéma, et tombe amoureuse, comme tout le monde alors, de Clark Gable, aventurier qui hésite au milieu de la jungle entre la brune prude...

le 7 juin 2011

28 j'aime

19

Mogambo
Pravda
6

Ava, la cruche à l'eau, et à la fin elle se casse.

J'ai voulu regarder Mogambo parce que j'avais ouï dire qu'il y figurait des hippopotames. Et si cela ne vous décide pas à regarder un film, je ne sais pas ce qu'il vous faut. Bon, un léger coup...

le 4 mai 2015

19 j'aime

4

Mogambo
JZD
8

Critique de Mogambo par J. Z. D.

Plus tard, quand je serai vieux, je veux absolument être Clark Gable ! Il est merveilleux et je voudrais que ça soit tous les jours comme ça ! De l'aventure, chaque matin, toute la jungle est là pour...

le 16 janv. 2012

16 j'aime

20

Du même critique

Ma liberté de penser
socrate
1

Ma liberté de tancer

Cette chanson est honteuse, un vrai scandale : il est absolument inadmissible et indécent de tenir de tels propos quand on gagne plusieurs millions d'euros par an, alors que des tas de gens galèrent...

le 11 avr. 2012

170 j'aime

76

La Ligne rouge
socrate
4

T’es rance, Malick ?

La ligne rouge, je trouve justement que Malick la franchit un peu trop souvent dans ce film, malgré d’incontestables qualités, que j’évoquerai tout d’abord. La mise en scène est formidable, la photo...

le 21 sept. 2013

134 j'aime

78

Ernest et Célestine
socrate
9

A dévorer à pleines dents !

Pour tout dire, je ne savais rien de ce film avant d’aller le voir, je craignais une histoire un peu gnangnan pour bambin à peine sorti du babillage. Bref, j’y allais surtout pour accompagner la...

le 10 janv. 2013

133 j'aime

22