Je ne vais pas vraiment critiquer cet excellent film, vrai-faux documentaire fait par un brave gars ironique de gauche sur un riche connard cynique de droite. Je le trouve parfait, jusque dans les mini-documentaires insérés qui éclairent les mécanismes de la déconnomie moderne dont le but est de plumer les humains en rigolant comme des bossus. Tous les acteurs y sont impeccables, au point qu'on finit par les détester tous, comme si on avait vécu dix ans avec chacun d'entre eux. Bref, ce film est réussi, là où "Le Capital" de Costa-Gavras était complètement raté.
Ce que j'ai envie de critiquer ici, c'est l'attitude fort bizarre de la critique professionnelle à son égard, qui a entraîné une réaction (ou plutôt, une absence de réactions) chez le public dit grand.
D'abord, "Moi, Michel G." n'est pas une comédie, c'est une satire ; une satire si grinçante qu'elle finit par ne plus faire rire du tout. Ensuite, elle est si réaliste que j'ai bien du mal à comprendre comment un individu qui se prétend humain peut espérer rire d'un tel sujet ; je veux dire, rire sans arrière-pensée. Mais après tout, pourquoi pas ? puisqu'il s'est trouvé des gens pour "admirer" les héros du "Wall Street" d'Oliver Stone ou pour croire que les personnages de "Margin Call" ou d'"In the air" sont des êtres humains comme les autres. Eh non ! En réalité, ce sont des ordures à forme humaine, petite nuance qu'il faudrait ne pas perdre de vue.
{Inter-remède : quand on commence à douter de la réalité humaine, le mieux est de revoir "L'île aux fleurs", si possible en boucle pendant une semaine, attaché à une chaise d'école, sans manger ni boire.}
Bref, si "Moi, Michel G..." n'a pas su séduire le grand public, c'est certainement parce qu'il met le doigt dans une plaie typique de ce début de millénaire : à savoir que l'ambition la plus répandue aujourd'hui, c'est précisément de devenir quelqu'un comme Michel G. Hélas, l'avouer à ses amis, ça fait mauvais genre. Ce qui gratte lesdits ambitieux au fond de leur petite conscience déclassée, c'est peut-être le vieux fond d'éducation solidaire dispensée par leurs parents soixante-huitards ; alors, ils renâclent et trouvent le film "moyen" ou "pas drôle", et ils évitent ainsi de se demander pourquoi le monde est comme il est : parce qu'ils espèrent en avoir un morceau plus gros que leurs voisins. Pour ça, il faut devenir un salaud.
Il y a des gens pour qui ce choix n'est pas difficile.
alfredboudry
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le 15 juin 2014

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le 15 juin 2014

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Alfred Boudry

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