Le public a découvert le nom de Lee Daniels en 2009, lors de la sortie de "Precious", mélodrame trash qui divisa les spectateurs et les critiques, mais permit au réalisateur afro-américain de se faire connaître.


Cette dimension outrageusement trash et outrancière, on la retrouve dans "The paperboy", faux polar et vrai récit initiatique, à travers la relation ambigüe entretenue par une trentenaire mûrissante à la sexualité débridée et un jeune minet de bonne famille, élevé par une bonne à tout faire black après le départ soudain de sa génitrice, au cours d'un été brûlant dans la Floride de la fin des sixties.


L'atmosphère moite et incertaine de ce lieu et de cette période mouvante est parfaitement rendue par la caméra de Lee Daniels, qui signe un film à la forme déroutante mais originale et maîtrisée, à base de couleurs pastels, de reconstitution soignée et d'un montage volontairement approximatif.
Cette stylisation extrême en agacera forcément certains (le film a été hué à Cannes en 2012), qui y verront une forme de prétention assez imbuvable, surtout couplée à la volonté de choquer un peu puérile car permanente de l'ami Daniels.


Le réalisateur américain adapte ici un polar psychologique du journaliste Pete Dexter, lui-même inspiré d'un fait divers, mais il semble que Daniels se contrefout de son intrigue policière, qui ne fait office que de prétexte.


Daniels préfère nettement se concentrer sur les portraits de ses divers protagonistes, souffrant tous plus ou moins de failles psychiatriques importantes, au premier rang desquels on retrouve le jeune et brûlant Zac Efron, qui s'en sort très honorablement pour l'un de ses premiers rôles vraiment sérieux, même s'il faut se préparer à le voir évoluer en petit boxer moulant la moitié du film.
D'ailleurs Lee Daniels ne se gêne pas pour booster la dimension homosexuelle de son histoire, le roman originel n'étant pas autant axé dans cette direction.


L'un des points forts du métrage tient à l'interprétation convaincante des comédiens, dans des rôles complexes voire franchement casse-gueule.
En évitant de trop en dire sur chaque personnage, puisque leurs personnalités respectives sont au cœur du sujet de "Paperboy", soulignons la prestation étonnante de Nicole Kidman en cougar azimutée, celles plus sobres de Matthew McConaughey et David Oyewolo en journalistes ambigus, et signalons la performance de John Cusack en sociopathe victime d'une justice expéditive.


En conclusion, ce n'est pas encore cette fois-ci que Lee Daniels fera l'unanimité, mais "The paperboy" mérite toutefois le coup d'œil, proposition cinématographique atypique et scandaleuse, étude de mœurs provocante mais assez subtile, certes non dénuée de maladresses, mais dont l'atmosphère caniculaire et languide permet d'excuser un certain manque de rythme - qui risque toutefois de rebuter ceux qui attendaient un véritable thriller.

Créée

le 19 juil. 2016

Critique lue 440 fois

5 j'aime

2 commentaires

Val_Cancun

Écrit par

Critique lue 440 fois

5
2

D'autres avis sur Paperboy

Paperboy
LeJezza
5

Urophilie mon amour

Difficile d'aborder sans à priori le nouveau film de Lee Daniels: hué à Cannes où il a fait parlé de lui en mal, Zac Efron à l'affiche, Nicole Kidman (que je n'affectionne pas toujours)... Mais...

le 18 oct. 2012

41 j'aime

12

Paperboy
Selenie
7

Critique de Paperboy par Selenie

Adapté d'un roman de Pete Dexter lui-même tiré d'un fait divers de 1960, un casting de rêve et un réalisateur talentueux qui cherche à confirmer après le remarqué "Precious". Etant afro-américain le...

le 19 oct. 2012

27 j'aime

Paperboy
Gand-Alf
2

Zac et Lee sur un arbre perchés...

Je vous narrais il y a peu ma triste mésaventure lors de l'opération "Precious", kidnappé que je fus par l'ignoble terroriste Lee Daniels qui tortura ma fibre sensible jusqu'à ce que je vomisse...

le 29 oct. 2013

21 j'aime

4

Du même critique

Baby Driver
Val_Cancun
4

L'impossible Monsieur Baby

Cette fois, plus de doute, le cinéma d'Edgar Wright, quelles que soient ses qualités objectives, n'est définitivement pas pour moi. D'ailleurs je le pressentais déjà fortement (seul "Hot Fuzz"...

le 20 juil. 2017

60 j'aime

15

Faites entrer l'accusé
Val_Cancun
9

Le nouveau détective

Le magazine haut de gamme des faits divers français, qui contrairement aux (nombreux) ersatz sur la TNT, propose toujours des enquêtes sérieuses, très documentées, sachant intriguer sans tomber dans...

le 2 avr. 2015

49 j'aime

11

Bullet Train
Val_Cancun
4

Compartiment tueurs

C'est le genre de film qui me file un méchant coup de vieux : c'est bruyant, bavard, ça se veut drôle et décalé mais perso ça m'a laissé complètement froid, tant les personnages apparaissent...

le 4 août 2022

46 j'aime

17