Pauline à la plage, long métrage typique du cinéma d'Eric Rohmer, traite sur le mode de l'oralité du paradoxe du désir amoureux : il est surtout un film réflexif, montrant avec amertume qu'il n'est pas nécessaire de se sentir aimé pour aimer en retour. Le cinéaste, en dirigeant ses six comédiens (trois hommes et trois femmes), développe une intrigue volontairement banale qui rappelle à certains égards les schémas narratifs du cinéma de Woody Allen, impliquant des couples questionnant le désir, l'amour et le cynisme qui, parfois, en découle.


Le film se laisse suivre avec un intérêt certain puisqu'il soulève des problèmes sentimentaux pouvant parler à tout un chacun. Malgré sa forme plate, quasiment minimaliste voire fauchée Pauline à la plage n'ennuie pas réellement, le discours rohmérien opérant constamment d'une séquence à l'autre : chez le cinéaste cinéma et verbe ne font qu'un, et la question du rapport au sexe opposé a toujours été l'une de ses principales préoccupations filmiques. La forme du couple, schéma classique, rend compte de la complémentarité des deux sexes. Cette complémentarité est du reste l'attente principale de Marion (Arielle Dombasle), personnage mettant un point d'honneur à trouver l'amour passionnel en quelqu'un d'éloigné de sa personnalité. Pierre (interprété par Pascal Gréggory) amoureux de Marion, cherche quant à lui les similitudes et la compréhension mutuelle : il incarne la figure du jeune romantique, et par conséquent du perdant. L'amour chez Eric Rohmer est un jeu au sein duquel les hommes se mesurent, avec cynisme et hypocrisie ; un jeu à travers lequel les femmes cherchent la surprise et parfois l'indépendance, et finalement l'impression passagère (Amanda Langlet, jouant l'adolescente Pauline, nous l'apprend dès les premières minutes).


Film plutôt réussi dans son ensemble Pauline à la plage demeure donc assez représentatif du cinéma rohmérien : discursif, quotidien et terriblement réaliste il reste un classique que tout bon cinéphile digne de ce nom se doit d'avoir vu. Un incontournable.

stebbins
7
Écrit par

Créée

le 31 mai 2015

Critique lue 516 fois

4 j'aime

stebbins

Écrit par

Critique lue 516 fois

4

D'autres avis sur Pauline à la plage

Pauline à la plage
Andy-Capet
7

Pauline à la cafét'

Ah ce film ! Il a l'odeur de la peau de Pauline, la peau des vacances... Derrière la sitcom d'une adolescente qui vit pour la première fois - et en miroir - ce que font "les plus grands", il y a ce...

le 3 nov. 2012

24 j'aime

22

Pauline à la plage
EricDebarnot
8

Erection, piège à cons

En 1983, nous fûmes nombreux à considérer qu'avec ce solaire "Pauline à la Plage", Eric Rohmer avait atteint une sorte de sommet formel et thématique de son œuvre. Séduits par les formes d'Arielle...

le 7 sept. 2022

18 j'aime

6

Pauline à la plage
JanosValuska
9

Cohabitation sentimentale.

Je relance mon cycle Rohmer – que j’avais un peu laissé de côté depuis Un beau mariage – avec ce film dont je pourrais dire qu’il s’agit de l’un de mes préférés mais je peux dire ça de tant d’autres...

le 30 juil. 2014

8 j'aime

2

Du même critique

La Prisonnière du désert
stebbins
4

Retour au foyer

Précédé de sa réputation de grand classique du western américain La Prisonnière du désert m'a pourtant quasiment laissé de marbre voire pas mal agacé sur la longueur. Vanté par la critique et les...

le 21 août 2016

42 j'aime

9

Hold-Up
stebbins
1

Sicko-logique(s) : pansez unique !

Immense sentiment de paradoxe face à cet étrange objet médiatique prenant la forme d'un documentaire pullulant d'intervenants aux intentions et aux discours plus ou moins douteux et/ou fumeux... Sur...

le 14 nov. 2020

38 j'aime

50

Mascarade
stebbins
8

La baise des gens

Nice ou l'enfer du jeu de l'amour-propre et du narcissisme... Bedos troque ses bons mots tout en surface pour un cynisme inédit et totalement écoeurrant, livrant avec cette Mascarade son meilleur...

le 4 nov. 2022

26 j'aime

5