Un film qui ne vieillira jamais et toujours en avance sur son temps
Miyazaki signe avec Mononoke Hime l'un de ses films les plus épiques et riches. Ses thématiques témoignent encore une fois d'une profonde intelligence et d'une grande sagesse, nous délivrant un message plus que jamais d'actualité.
Il dépeint une humanité en proie à ses démons éternels. Maléfiques de par leur cupidité, les Hommes se tuent entre eux et se battent contre le reste du monde vivant. Etant constamment dans la peur d'être vaincus par leurs voisins, ils n'hésitent pas à rompre avec toute morale et abandonnent tout respect, pillant la nature jusqu'à la violer.
Miyazaki n'est pas du tout, comme une analyse simplette pourraient l'envisager, contre le progrès technologique, comme le témoignent tous ses autres films montrant notamment son amour pour l'aviation. C'est également un féministe convaincu et le village des forges montre ici des femmes en marche vers leur émancipation, un autre symbole d'un progrès (là où les armes à feu sont vues comme une évolution néfaste, pas un progrès).
Ses personnages ne sont jamais entièrement bons ou mauvais. Dame Eboshi est ici le parfait exemple. Sa grande générosité l'a fait se battre pour ses femmes et ses lépreux qu'elle est la seule à aider. Mais sa bêtise en fait un bien piètre exemple de féministe. Elle applique pour se défendre et s'imposer les même forces de domination qui ont soumis les femmes et n'éprouve aucun respect pour la nature qui l'a enrichie. Les gens du village natal d'Ashitaka sont en revanche très respectueux de la nature mais il est intéressant de constater que malgré une chaman femme, la totalité des décisionnaires du village sont des hommes. Deux peuples foncièrement différents mais ni bons ni mauvais, juste luttant pour leur survie, mais dont la conscience est encore partielle/fragmentée.
A côté de ça, Ashitaka représente l'espoir de l'humanité (l'espoir vient toujours du plus petit nombre). Il est respectueux de ses semblables et de toutes les formes de vie. Il ne prend jamais parti bêtement et déborde d'amour pour son prochain.
Il tombe amoureux de la princesse sauvage Mononoke qui vit en harmonie avec la nature mais détestant l'Humanité qu'elle associe uniquement avec ceux qui détruisent son lieu de vie. Bornée, elle ira jusqu'à refuser de vivre avec Ashitaka, méprisant trop l'humanité (alors qu'il est le plus bel exemple d'humanité).
Myazaki nous montre dans un final saisissant la vision apocalyptique d'un monde où toute vie a disparue, devenu entièrement minéral. Heureusement, Dieu ("il est la vie même") est bienveillant et la vie repartira, encore et encore, avec ou sans humains.