Comme toujours avec Wes Anderson, Rushmore fait l'effet d'une bouffée d'air frais : un plaisir constant d'un peu plus de 90 minutes, fait de poésie, de dialogues savoureux et d'acteurs merveilleusement dirigés. Entre le génialissime Bill Muray et le très communicatif Jason Schwartzman, navigue une palette de personnages esquissée avec beaucoup de finesse pour donner vie à ce monde si particulier qui est typique du cinéma d'Anderson. Espace visuel sans cesse envahi par la couleur, des idées en pagaille qui n'ont d'autre but que de nous faire sourire, des caractéristiques bien singulières qui construisent chaque personnage aux situations improbables qu'ils jouent à l'écran, chaque seconde d'image est imprégnée de l'inspiration sans borne d'un auteur qui prend plaisir à tourner.
Le plaisir est plus que partagé, et en bon fan boy, je n'ai pu me séparer du premier rictus qui a transformé mon visage en début de film. Schwartzman y est pour beaucoup, d'un naturel à toute épreuve, et pourtant si décalé, il pourrait faire n'importe quoi, le rire serait toujours présent. Et même si Anderson délivre finalement un message assez subtile et pas aussi drôle qu'il n'en a l'air, jamais il ne dramatise ce dernier. Préférant laisser ses personnages parler pour lui, il ne s'égare pas dans des situations qui pourraient être moralisatrices. Et c'est ce que j'aime chez ce réalisateur, cette liberté de ton qui est omniprésente dans son oeuvre sans jamais pour autant se vouloir revendicatrice de quoique ce soit. Chacun y voit en effet ce qu'il veut y voir, et pour peu qu'on soit réceptif à l'univers particulier auquel on a accès, chaque séance prendra l'apparence d'une récréation rafraîchissante mixant intelligence et créativité.
Rushmore n'est que le second film de Wes Anderson, co-écrit avec Owen Wilson, et déjà il préfigurait toutes les oeuvres à venir des deux hommes. Une réussite totale, aussi attachante qu’impressionnante de maîtrise, qui consolide sans forcer mon statut d"Anderson Biatch.