Le film de Gerard Kargl est une oeuvre pionnière qui inspira de nombreux réalisateurs comme Gaspar Noe. Schizophrenia, dénommé "Angst" (qui signifie l'angoisse) dans la version originale, nous dépeint en temps réel les agissements d'un malade mental à sa sortie de prison. Nous ne sommes pas en face d'un film traditionnel. Le prologue du film, rappelant le travail de Noe dans Seul contre tous, n'est pas forcément d'une grande importance mais nous met tout de suite dans l'ambiance (cette scène avec la lampe). D'une durée courte (1h15), le film n'est quasiment jamais composé de dialogues mais fait place à une voix off omniprésente, celle du meurtrier. Cette dernière nous permet de comprendre les agissements et les pensées de son ôte, en nous racontant ses pulsions et les brides qu'il a connues durant son enfance.

Les imbroglios sur sa vie antérieure ont souvent une incidence sur ses actions, et le réalisateur arrive à parfaitement calquer les deux facettes. Par exemple lors du meurtre de la personne âgée dans la maison, la voix off nous explique sa jeunesse avec sa propre grand mère. La violence du film n'est pas tant visuelle (même si le dernier meurtre est assez marquant), c'est surtout le sadisme du personnage et son manque total de prise de recul qui font froid dans le dos, comme le montre la scène finale. Erwin Leder, est physiquement assez effrayant et son jeu tout en authenticité est traumatisant. Schizophrénia ne fait pas dans l'émotion ou dans la psychologie de comptoir, mais nous enfonce dans les pensées morbides d'un assassin en quête de plaisir.

Le film date des débuts des années 1980 mais visuellement, il n'a pas pris une ride. L'ambiance retranscrite est toujours aussi glauque (cette superbe poursuite dans le noir et dans les escaliers) et les idées visuelles qui composent le film impressionnent toujours autant. Que cela soit ces plans aériens ou cette utilisation de la snorricam. La réalisation de Kargl est en totale cohésion avec la voix off, et nous place au près du tueur, comme s'il ne faisait qu'un avec le spectateur. Le film est très épuré et ne se focalise que sur son tueur et ses victimes. Le spectateur est au première loge de cette descente aux enfers, grâce notamment à un travail sur le son hypnotisant. Malgré sa lenteur, Schizophrénia retient en haleine grâce à sa voix off d'une noirceur incandescente et ses multitudes idées de cinéma et de cadrages toujours aussi intéressantes.
Velvetman
8
Écrit par

Créée

le 25 févr. 2014

Critique lue 551 fois

12 j'aime

1 commentaire

Velvetman

Écrit par

Critique lue 551 fois

12
1

D'autres avis sur Schizophrenia

Schizophrenia
real_folk_blues
8

Ce réal qui leurre...

Sur le papier, Schizophrenia avait tout pour sentir la bobine casse gueule : son sujet, une voix off, son affiche, la traduction de son titre en français ; et surtout une réputation de film...

le 3 mai 2013

52 j'aime

11

Schizophrenia
Sergent_Pepper
8

Eighties minutes inside

On a beau tenter de dépasser les clichés lorsqu’on se retrouve face à des œuvres d’art, on ne peut s’empêcher, face à Angst, de conclure qu’il n’y a vraiment que les autrichiens pour nous proposer de...

le 6 nov. 2017

44 j'aime

8

Schizophrenia
Deleuze
8

Extravagante démence

Schizophrenia, autrement dit jusqu’où la perversion de l’homme peut-elle aller ? Doté d’une narration extrêmement efficace, à tel point que le personnage principal n’aura pas besoin d’ouvrir la...

le 26 mai 2013

35 j'aime

Du même critique

The Neon Demon
Velvetman
8

Cannibal beauty

Un film. Deux notions. La beauté et la mort. Avec Nicolas Winding Refn et The Neon Demon, la consonance cinématographique est révélatrice d’une emphase parfaite entre un auteur et son art. Qui de...

le 23 mai 2016

276 j'aime

13

Premier Contact
Velvetman
8

Le lexique du temps

Les nouveaux visages du cinéma Hollywoodien se mettent subitement à la science-fiction. Cela devient-il un passage obligé ou est-ce un environnement propice à la création, au développement des...

le 10 déc. 2016

260 j'aime

19

Star Wars - Le Réveil de la Force
Velvetman
5

La nostalgie des étoiles

Le marasme est là, le nouveau Star Wars vient de prendre place dans nos salles obscures, tel un Destroyer qui viendrait affaiblir l’éclat d’une planète. Les sabres, les X Wing, les pouvoirs, la...

le 20 déc. 2015

208 j'aime

21