Alors disons le tout de suite : Seul sur Mars est un film moyen. En tout. Ce n'est pas un mauvais film, mais il n'est ni un bon divertissement spectaculaire, ni une réinvention de la science fiction spatiale. Yeux timides, sautez cette critique pleine de spoiles.


D'abord, les personnages et le héros : un homme qu'un coup du sort oblige à survire seul sur un planète déserte. Ok, l'homme en question est sympathique, il fait des petites blagues, mobilise la pop culture... mais sa personnalité n'est pas folichonne non plus. On ne sait pas s'il a des enfants, une femme, une famille (juste des parents évoqués rapidement) et surtout on sort de la salle sans avoir l'impression de le connaître. Il est courageux, d'accord, mais comment envisager sa grandeur quand on ignore ses failles ? Pareil pour les autres personnages : pas ratés à proprement parler mais simplement vides, trop peu humains. Ils n'existent que pour incarner des fonctions : le héros est botaniste, ses compagnons sont chimistes, physicien, militaires, etc. Sur la Terre c'est encore pire puisque la puissance narrative y est quasi nulle. Les acteurs sont à l'image du reste du film : lisses, ternes, pas nanardesques ou pitoyables mais pas bon non plus.


L'histoire ensuite : euh... Plutôt que dire ce que vous verrez dans Seul sur Mars, je vais vous dire ce que vous n'y verrez pas : la tension d'Appolo 13, le grand message de Mission to Mars et l'incroyable sentiment de profondeur d'Interstellar - ces films ne sont pas forcément des chef d’œuvres mais ils réussissent tous à se démarquer d'une manière ou d'une autre. Pas Seul sur Mars qui sera, à mon avis, oublié dans quelques années parce qu'il n'a rien apporté de nouveau à son genre ou au cinéma. En parlant de ça : les effets spéciaux sont... moyens, oui encore. Quand on a vu les modélisations des films de Blomkamp ou, encore une fois et pour prendre un exemple récent, d'Interstellar, on peut dire que le film de Ridley Scott est décevant. Les paysages martiens font faux - je n'en suis pas sûr mais je crois que c'est à cause de la représentation de la lumière. Après tout n'est pas à jeter : le rendu des tempêtes est excellent et donne pour le coup des images assez neuves. La réalisation d'une manière générale est classique, terriblement classique.


Enfin le fond : un héros qui survit à force de courage et d'inventivité (figure du self-made-man), des compagnons qui sont prêts à désobéir pour sauver leur ami (l'humanité ne laissent personne derrière), une alliance entre les États-Unis et la Chine qui dépassent les dilemmes diplomatiques au nom d'un idéal supérieur, etc. etc. La morale est convenue, tiède, essayant de plaire à tous, bref, blockbusteresque.


Il n'y a vraiment rien d'autre à dire... ça se laisse regarder, c'est parfois impressionnant - heureusement vu son budget - parfois drôle, toujours fade. La seule chose qui sauve le film, c'est sa naïveté, peut-être feinte, cette volonté visible de pondre une œuvre générationnelle sur la conquête spatiale alors que Mars n'a jamais été aussi près de nous.


En deux mots : presque passable.


[Edit : et pour les curieux, le film est sorti dans les salles le 7 octobre en Belgique, d'où cette critique en avance sur la France.]

smiree14

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