James vieillit mais avec classe !
N’en déplaise aux puristes, James Bond est une saga des plus inégales, ayant des hauts et des bas. Toutefois, on était en droit d’attendre de l’association Sam Mendes/Daniel Craig quelque chose de différent de ce à quoi les différents réalisateurs, tâcherons des studios de production, nous avaient habitué. Et le résultat est véritablement surprenant ; le film recelant de moments de grandeurs complètement inattendus.
Sam Mendes d’abord. Réalisateur confirmé, auteur à ses heures perdues, l’Américain sait y faire quand il s’agit de conter une histoire sur le grand écran. On se rappelle notamment le plus que réussi American Beauty, critique acerbe d’un rêve américain idéalisé ou plus récemment, les Noces Rebelles. Aussi, le voir s’attaquer au mastodonte qu’est Skyfall permettait d’espérer un renouveau de la saga et plus généralement du film d’action. Pari réussi étant donné la qualité d’une mise en scène bien plus traditionnelle, tirant un trait sur les souvent pitoyables « Jason Bourne like » : les scènes d’actions sont fluides, elles relèvent d’un artisanat perdu et sont d’autant plus jouissives qu’elles ne sont pas filmées de manière épileptique. Et en tant que conteur d’histoires, Sam Mendes va même plus loin en développant la personnalité des différents protagonistes auxquels on nous avait habitués, en les faisant progresser tout au long d’une histoire de vengeance assez simpliste. James Bond n’a jamais été aussi humain et ses traits de caractères sont exacerbés pour lui faire prendre vie à l’écran et M, véritable James Bond girl du film, crève l’écran, emplissant le film d’une dimension de thriller qu’on n’est généralement pas en droit d’espérer dans ce genre de film.
Daniel Craig ensuite. Parce qu’il est assurément le meilleur James Bond, surpassant facilement Sean Connery, il arrive à faire oublier un temps sa masse musculaire pour montrer que même l’agent 007 des services secrets de sa Majesté n’est pas infaillible. Pire, il n’est immortel, il vieillit et le ressent. Grâce à une direction d’acteurs impeccable (encore une fois, merci Sam !), Daniel Craig nous montre qu’il peut aussi être un très bon acteur. Très impliqué sur le tournage, il ira même jusqu’à réaliser la plupart de ses cascades lui-même, arguant que l’écran vert n’est là que pour soutenir la scène et n’est pas une fin en soi. Adieu Jason Bourne, bonjour 007 donc et c’est pour le plus grand bonheur du spectateur qui ne regrette pas les files d’attente et le prix exorbitant d’une place de cinéma de nos jours.
Parce qu’il a fait l’objet d’un reboot, l’espion le plus connu au monde (c’est un comble !) renait de ses cendres et fait oublier les piètres performances d’un Pierce Brosnan sur la fin de son passage ainsi qu’un Quantum of Solace oubliable. Après la première mission de l’espion et une partie de poker intense, l’univers se réinstalle petit à petit, remettant au goût du jour un Q toujours aussi taquin, une Miss Moneypenny jouissive et bien sûr un chef, M, toujours plus adorable, de par ses défauts et son engagement dans les missions du MI6. La recette du succès est simple, efficace, mais il fallait encore la maîtriser : jouer avec les codes, ajouter une pincée de nostalgie pour les initiés et pour les autres aussi et tirer des personnages de Ian Flemming tout ce qu’il y a de meilleur.
La véritable partie de poker se déroule finalement dans cet opus, laissant présager le meilleur pour la suite de la carrière bien avancée de James Bond. Sam Mendes a su tenir tête aux studios et imposer sa patte dans la réalisation, s’entourant de proches collaborateurs et en véritable connaisseur de la série, à imposer de nouveaux codes. Qui a dit qu’une tête blonde sur un tas de muscles ne pouvait pas être James Bond ? Il s’est bien trompé et l’argent dépensé a, une fois n’est pas coutume, été gage de qualité.