Un joyau admirable, de bout en bout. LE chef d'œuvre de Tim Burton.

La légende d'Ichabod Crane et du cavalier sans tête est devenu un diamant noir sous le regard de Burton, du chef-opérateur E. Lubezki et du décorateur Rick Heinricks, qui ont façonné (de toutes pièces: la forêt est magnifiquement reconstituée dans les studios anglais de Shepperton) un univers sombre et angoissant, un spectacle d'une beauté rare, en hommage aux films de la Hammer des années 60 (que souligne la présence au générique de Christopher Lee, inoubliable Dracula). Le réalisateur a peint sa toile d'un rouge sang volontairement artificiel (comme il le fera plus tard dans "Sweeney Todd").
Burton est parvenu à mêler les genres de manière harmonieuse: l'horreur, le fantastique, la romance, l'énigme...l'humour est très présent (particulièrement dans la composition savoureuse de Johnny Depp), mais ne prend jamais le pas sur la conduite du récit.
"Sleepy Hollow" est un film sur l'"entre-deux": nous sommes à,la croisée de deux époques (le XIXe siècle approche), de deux visions du monde (le regard logique, cartésien de Crane contre les enchantements et la sorcellerie présentes autour de lui), de deux univers dissemblables: le SANG et la POÉSIE (voir la première rencontre entre Crane et Katrina, et les souvenirs d'enfance du jeune homme), la désolation et l'étincelle (la tristesse brumeuse, vaporeuse et grisâtre de la bourgade, égayée par la lumière des quelques citrouilles), l'illusion d'optique (le cardinal dans sa cage) et la vraie magie noire. L'arbre des morts est un lieu de passage, une porte entre ces univers.
Tout est double, réfléchi comme par un miroir déformant: chaque membre de la petite communauté dissimule sa vraie nature. Katrina, jeune fille à la beauté pure, pratique la magie blanche (son double inversé, sa marâtre, maîtrise des forces plus ténébreuses); Ichabod refoule le traumatisme de sa jeunesse; les notables de Sleepy Hollow cachent de lourds secrets...
Burton joue à nous faire peur: la splendide scène du photophore nous montre des sorcières et des créatures terrifiantes qui volent autour de nous, et nous attirent comme ce petit garçon fasciné par ces images...la barbarie de l'attaque du cavalier dans la séquence suivante nous hypnotise de la même manière. La poursuite finale, admirablement montée et très dynamique, s'achève par un "baiser de la mort" saisissant et mémorable.

Tim Burton s'est entouré de bon nombre de ses habitués: Johnny Depp, Jeffrey Jones et Lisa Marie chez les acteurs, ou encore Danny Elfman à la musique: pour tous, il s'agit ici d'un des sommets de leurs carrières respectives. Chaque maillon de la chaîne artistique du film offre son meilleur.

Un éblouissement de chaque instant!

Frankoix
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le 26 juil. 2010

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