Avec Sonatine, un titre qui sonne comme une œuvre de jeune premier qu'il n'est pas, Kitano signe ce qui fut probablement son premier très grand film, ou du moins celui qui lui ouvrira les portes au-delà des frontières nippones. Le film de la reconnaissance artistique en quelque sorte. Dorénavant l'Occident fera de celui-ci un cinéaste reconnu, probablement la nouvelle référence du cinéma japonais
.
Réalisé deux ans après son somptueux et très zen A Scene At The Sea, on trouve dans Sonatine tout ce qui fait le cinéma du clown blanc japonais. Les yakuzas qu'il décrit comme de grands enfants revenus de tout qui cabotinent et se raillent avant d'exploser dans des éclairs de violence pathétique, les jeux de plages et un humour noir qui sous tend une peinture au vitriol d'un Japon du grand banditisme et des gangs de tatoués.


Les explosions de violence fulgurantes laissent néanmoins souvent place à des instants en suspend où le temps semble arrêté et à une élévation picturale magnifiée par des moments d'une grande poésie.


Joe Hisaishi, compagnon de route de Kitano compose là une partition somptueuse qui continue de résonner longtemps après la fin du film.


Dans Sonatine, les yakuzas partent à la plage afin d'échapper le temps de quelques grivoiseries et autres jeux cruels à leur condition d'hommes en sursis. Il y a de la gravité dans ces regards vides de bouffons mono-expressifs, mais beaucoup de légèreté dans leurs actes. Même donner la mort semble un jeu.


Somptueux méli-mélo fait de bouffonnerie sommaire et de violence graphique, on retrouve dans Sonatine le cinéma de Kitano à sa manière de figer les personnages dans des pauses où les visages perdent toute forme d'expression. Un style qu'il labellisera en quelque sorte. Redondant et parfois exagérément longs, ces tics de mise en scène que certains peuvent lui reprocher, portent pourtant le sceau d'un grand cinéaste au style unique.

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le 9 juin 2016

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