J'aurais voulu rentrer dans l'abri
Sans aucun doute la critique la plus complexe à écrire depuis mes débuts sur SC !
En effet, le film questionne sur ce qui fait une grande oeuvre: la puissance des thématiques, la mise en scène au service de celle-ci. Mais selon moi, également un dernier chainon: provoquer des sentiments, une réaction, une implication du spectateur.
C'est ce qui manque ici pour m'emporter dans ce film passionnant.
Dès la séquence d'ouverture, le tonnerre, les nuages noirs, évoquent immédiatement cette menace latente qui pèse sur cet américain moyen sans histoire, qui ne pense qu'à protéger sa famille.
J'y ai vu beaucoup de similitudes entre Donnie Darko et le personnage mutique et isolé, magistralement interprété par Michael Shannon(comme sa femme d'ailleurs).
Toute la richesse du film est là, évocatrice d'une Amérique schizophrène, à la fois forte dans son rôle protectrice(le père,la famille,les valeurs), mais qui vit dans la peur(économique,écologique,nucléaire) qui la pousse à la régression, le repli(le bunker).
On comprend parfaitement où Nichols veut nous emmener, grâce à une mise en scène épurée, une photographie magnifique, souvent évocatrice et contemplative.
C'est là que le bat blesse, l'évocation de cette menace permanente, censée monter en puissance, est annihilée par les rêves et apparitions qui -bien que visuellement magnifiques- sont très redondants. On reste finalement à quai de cette fable magnifique.
Et je me rends compte qu'il est beaucoup plus intéressant d'en parler, par la force des thématiques, que du sentiment final ressentit.