BEST. FILM. EVER.

Taxi Driver semble sorti du plus profond des tripes d'un scénariste en état de grâce (Schrader) et d'un réal tout simplement génial.
Description sans concessions, ou presque puisque le rôle tenu par Keitel devait être incarné par un afro-américain, ça faisait un peu trop pour Schrader, d'un homme en crise de la trentaine. Globalement perdu, insomniaque, il parcoure les rues de NY au volant de son taxi, métaphore de la solitude, du foyer mouvant quand le compteur est off.
On part donc de ce constat, un homme, seul, un taxi, on ajoute un univers putride, d'aucuns diront plutôt réalistes, et une mentalité de l'environnement du personnage un poil xénophobe. A cela s'accroche une love story que l'on devine impossible, vouée à l'échec cuisant, et bien entendu... Là où Scorcese frappe fort, c'est dans la construction mentale de ses personnages, à quel point il a su cerner ce qui peut faire chavirer un homme dans cette période de sa vie où il devrait être, d'après la société et ses codes, le plus stable possible. Ici, il ne fait aucun doute que le personnage incroyablement interprété par De Niro n'a pas d'autre choix que de péter un boulon. Quand ce n'est pas l'échec amoureux, c'est l'exemple d'une fillette de 12 ans, prostituée, qui l'attaque au plus profond de ses entrailles, et le pousse à prendre les armes dans une séquence qui restera à jamais parmis les plus percutantes qu'un spectateur puisse voir. Sinon LA plus percutante, un grand moment de violence extrême, court mais d'une intensité redoutable tant chaque plan est utile, justifié, tant Scorcese utilise l'espace à merveille. Une grande leçon pour tous les cinéastes qui s'essaieront, par la suite, au gunfight.
Bien entendu, le film regorge de détails qui font monter la puissance du pétage de boulon. La politique y est montrée comme une entité humainement totalement inutile, la police brille par son absence, Scorcese ose traiter du racisme anti-blanc dans certains quartiers chauds de NY, l'amitié est impuissante, etc.

SPOILER

Un petit mot sur la fin, qui ne doit pas être mal interprétée sous peine de sortir du film avec une mauvaise impression. Bickle meurt bel et bien sur le canapé. Tout ce qui suit n'est qu'une sorte de fantasme du dernier souffle, souligné par un effet sonore étrange, pendant les dernières secondes, qui coïncide avec un pano vertical extirpant l'image du cadre crasseux de la rue.

FIN DU SPOILER

Effet sonore qui met fin à la quête du personnage, initialisée dans une séquence brillante au possible où, par un astucieux montage, Scorcese fait passer Bickle de l'autre côté du miroir devant lequel il se tient. Quasi imperceptible, juste assez pour marquer l'inconscient.

Brillant, génial, marquant, et impossible à faire en France.
Bavaria
10
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le 29 nov. 2010

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