C'est ainsi que commence mon cours de rattrapage de la filmographie de Martin Scorcese. Taxi Driver. L'intense regard de Robert de Niro, perdu à jamais dans le rétroviseur de son taxi. Celui, non moins resplendissant, de Jodie Foster, reflétant une jeunesse désillusionnée, plus vraiment innocente.


Pourquoi Travis est-il soudainement devenu chauffeur de taxi, travaillant sans relâche la nuit pour amener toute la pourriture de New-York à bon port ? Peut-être est-ce parce qu'il ne dort pas la nuit, troublé par sa propre solitude. Le travail aide parfois à combler un vide, celui de la futilité de l'existence et celui, donc, de la solitude. Après tout, nous sommes tous à la recherche d'une raison de vivre. Travis la trouvera-il dans les beaux yeux de cette (non moins belle) blonde qui travaille pour la campagne d'un respectable sénateur ? Ou bien dans ceux d'Iris, la (trop) jeune prostituée en détresse ?


Avec Taxi Driver, Scorcese, impose un style de réalisation unique, évocateur et imprévisible qui en a inspiré tant après lui, où la violence inouïe peut surgir aussi subitement qu'un monologue d'une futilité risiblement culte (Tarantino n'est pas loin). C'est enfin lorsqu'il filme le flou existentiel de son personnage que Scorcese se révèle le plus doué. Bande-son entêtante et envoûtante de qulques notes de saxophone, errances du taxi à travers les rues de New-York, et une caméra qui se place à des endroits inexplorés, captant parfois des couleurs frôlant l'abstraction.


Entre belles promesses d'un politicien désireux du pouvoir, prostituées et braqueurs aussi communs qu'un Magnum .44 sous le blouson, Scorcese peint une Amérique à l'agonie. Une Amérique qui récompense les auto-justiciers, encore sous le choc de la guerre du Viêt-Nam. Le film a pourtant assez de scènes cocasses pour réjouir le spectateur qui n'en demeure pas moins troublé par l'onirisme brutal de Taxi Driver, et admiratif d'une mise en scène aussi incroyablement millimétrée et novatrice. Notamment le temps d'un travelling au-dessus d'une scène de crime, alors que le temps semble s'être arrêté.

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le 27 juil. 2015

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Marius Jouanny

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