Bardé de récompenses et intronisé porte étendard du cinéma français pour les Oscars par une campagne marketing agressive des frères Weinstein, The Artist occupe l'espace médiatique : un succès et une attention totalement mérité et guère surprenant au regard du potentiel du projet.
Faire un film muet, en noir et blanc en forme de déclaration d'amour au cinéma américain des débuts : c'était bien là un coup de génie que l'on doit à Thomas Langman, producteur inégal mais toujours très ambitieux, et à Michel Hazanavicius, le seul réalisateur à avoir apporté du sang neuf dans le paysage sclérosé de la comédie Française avec le fantastique OSS 117 et sa suite non moins géniale.
Dès lors la somme des talents réunis et le potentiel artistique fou du projet ne pouvaient donner qu'un bon film...

The Artist est un film dont l'audace formelle justifie à elle seule la vision. Totalement inattaquable la mise en scène d' Hazanavicius touche souvent sublime grâce à un noir et blanc magnifique et à une composition des cadres astucieuse qui accouche de véritables moment de poésie sur pellicule. L'ensemble est transcendé par une direction artistique exemplaire qui transforme le métrage en véritable madeleine de Proust pour les nostalgiques des Chaplin, Fairbanks et co d'autant que les interprètes font honneurs à leurs glorieux aînés. Bérénice Béjo, James Cromwell, John Goodman (dans un rôle de producteur qu'il campait déjà dans le méconnu Panic à Florida Beach de Joe Dante) et Jean Dujardin sont parfaits même si ce dernier à tendance à recycler ses mimiques d'OSS 117, le personnage de George Valentin n'étant pas si éloigné que ça de l'inénarrable Hubert Bonisseur de La Bath.
On regrettera cependant le classicisme d'une histoire qui si elle reste plaisante à suivre, ne fait preuve d'aucune originalité dans la caractérisation des personnages ni dans les rebondissements qui demeurent cruellement prévisibles.
Malgré un arc narratif passionnant (la Star du muet ruinée par le passage au parlant), une belle histoire d'amour et une étonnante capacité à passer de l'humour au drame, c'est ce scénario efficace mais guère transcendant qui empêche The Artist de dépasser son de divertissement doublé d'un brillant exercice de style pour atteindre celui de chef d'œuvre.

The Artist est donc un film formellement époustouflant mais auquel il manque ce petit supplément d'âme qui fait les grands films. Ainsi, malgré l'indéniable talent de l'équipe et les trésors de cinéma qu'il déploie The Artist est peut-être un peu limité par son statut de film hommage. On est curieux de voir ce qu'aurait donné le métrage si Hazanavicius avait placé cette dimension au second plan pour mieux embrasser un genre spécifique...
Mais qu'importe ! La proposition de cinéma unique de The Artist en fait un film à voir ne serait-ce que pour en prendre plein les yeux et parce que c'est ce cinéma Français là qu'il faut défendre !




Diego290288
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 3 févr. 2012

Critique lue 261 fois

Diego290288

Écrit par

Critique lue 261 fois

D'autres avis sur The Artist

The Artist
Marius
1

La blague américaine

En terrain conquis. Le mec de "la Classe américaine" à Cannes? Ça clignotait de partout: ce film est fait pour moi. 5h34 plus tard (en réalité, le film est un poil moins long), j'avais l'impression...

le 15 mai 2011

106 j'aime

66

The Artist
Torpenn
3

La première fois que Dujardin vit Bérénice, il la trouva franchement laide.

Au lieu de revoir en boucle Une étoile est née et Chantons sous la pluie, Michel Hazanavicius aurait dû voir et essayer de comprendre un peu plus de films muets, et pas seulement se contenter de les...

le 2 avr. 2012

96 j'aime

53

The Artist
Hypérion
8

Une salle de cinéma, c'est incroyablement bruyant...

Deuxième séance, nouvelles impressions : Plutôt que d'attendre une sortie DVD pour me revoir "The Artist" dans de bonnes conditions, je me suis offert une séance matinale dépourvue de spectateurs...

le 21 oct. 2011

70 j'aime

32

Du même critique

Jason Bourne
Diego290288
5

L'épisode de trop...

Après une première trilogie cohérente et globalement réussie (on oubliera volontairement le spin-off raté avec Jeremy Renner...), on pensait que le duo Damon / Greengrass volerait vers d'autres...

le 10 août 2016

39 j'aime

6

L'Interview qui tue !
Diego290288
6

THEY HATE US CUZ THEY AIN'T US !

On ne va pas revenir sur tout le cirque politico-médiatique engendré par The Interview car n'en déplaise aux naïfs qui y voient une violente charge politique et aux hipsters qui dénonceront une...

le 25 déc. 2014

36 j'aime

3

Ghost in the Shell
Diego290288
3

EMPTY SHELL

Il est très difficile pour moi d'être objectif concernant Ghost in The Shell sachant que les films de Mamoru Oshii et la formidable série Stand Alone Complex ont été de véritables traumatismes geek...

le 29 mars 2017

35 j'aime

2